Avocat en construction et copropriété

Année : 2007 (Page 2 of 4)

Où agir en cas de contrefaçon de vos oeuvres sur Internet ?

Voici un petit cas pratique qui est hélas très fréquent en matière de création.

Vous êtes un artiste et en vous baladant sur le Web, vous constatez avec horreur que vos dessins (ou créations de toutes sortes) sont reproduites sur un site sans que vous n’ayez donné votre autorisation – en réalité, sans même que vous en ayez été informé par le contrefacteur indélicat.

Or, après avoir fait un Whois, vous constatez, par exemple, que l’indélicat en question est domicilié, disons, à Biarritz, pendant que vous-mêmes êtes à Strasbourg. Et pour compléter le tableau, vous avez eu la bonne idée de faire appel à un avocat, qui lui est à Paris.

Vous vous retrouvez face à un problème de compétence territoriale du Tribunal, c’est-à-dire, quel Tribunal saisir, géographiquement parlant.

En principe, l’action judiciaire s’intente au Tribunal correspondant au domicile du défendeur. Or vous n’avez pas envie de payer des fortunes pour que votre avocat aille vous défendre à Biarritz, logique. Mais vous aimeriez garder votre avocat parisien, tout de même.

Pas de panique.

En effet, en matière d’internet, on peut utiliser une autre règle de compétence des tribunaux.

En effet, lorsqu’un dommage est subi, le Code de procédure permet de saisir la juridiction du lieu précisément où le dommage est subi.

La solution est ainsi de demander à un huissier à Paris d’aller constater la matérialité de la contrefaçon ; votre avocat fera ça très bien.

Par conséquent, le dommage sera subi à Paris, et les tribunaux parisiens pourront statuer sur votre cas. Plus de problème de géographie et des coûts en moins. Bien, non ?

L’enfer du Sunbeach

Impressions d’audience, la suite.

Une affaire assez rigolote, les avocats racontent leurs histoires de façon joviale, l’atmosphère est détendue, c’est agréable (ça change des crêpages de chignon autour de 157 euros de loyer pas réglé…)

L’avocat en demande raconte le périple de ses clients, qui avaient acheté un voyage en tunisie au voyagiste en défense.

« Oui, vous comprenez, mes clients, à l’hôtel Sunbeach, ils arrivent dans la chambre, la moquette est sale et tachée, les draps sont douteux. Dans la salle de bain, la robinetterie est rouillée, les joints pas faits, certains fils électriques à nu…

La plage et la piscine, n’en parlons pas ! Les transats sont sales et certains sont cassés. La plage… on se prélasse à côté du tracteur avec remorque garé juste à côté. 

Et puis il y a des choses vertes qui flottent dans la piscine. J’ai à mon dossier un films tourné par mon client qui montre la femme de ménage remplissant son seau dedans (heureusement qu’elle ne le vidait pas…)

C’est bien simple, ils ont appelé leurs vacances l’enfer du Sunbeach. 

Bref, mes clients ont passé une semaine calamiteuse, dans ce qui était annoncé comme un hôtel 4 étoiles! QUATRE ETOILES, c’est scandaleux! »

Et là, l’avocat de la défense, sans se démonter:

« Ben oui, c’était quatre étoiles tunisiennes ».

Comme c’est charmant.

Audience du tribunal d’instance. Pas moins de quatre avocats se présentent à la barre. Ce n’est pas forcément fréquent, tout ce monde d’autant que l’après midi a surtout vu passer des affaires de loyers impayés.

L’affaire est édifiante. (Et pas uniquement parce que l’avocat de la défense a une voix terriblement soporifique).

Madame, en 1997, souscrit un contrat d’assurance vie. Elle inscrit sa fille en qualité de bénéficiaire dudit contrat.

En 2001, soit quatre ans plus tard, Madame est placée sous tutelle car atteinte de la maladie d’Alzheimer. Monsieur, son mari et père de la bénéficiaire du contrat, est le tuteur. Madame décède en 2005.

A son décès, naturellement, les sommes concernées par l’assurance vie sont reversées au bénéficiaire, Mademoiselle. Ce qui déplaît souverainement à Monsieur.

Ce dernier a donc la bonne idée d’assigner sa fille afin d’obtenir la restitution du montant versé – environ 4000 Euros. Et pour faire bonne mesure, Monsieur engage également la responsabilité de la banque et de l’assureur.

Au soutien de sa demande, il affirme être le véritable bénéficiaire de l’assurance vie et que sa fille aurait modifié frauduleusement le contrat pour y apposer son nom, spoliant ainsi son père.

L’ennui c’est qu’on se rend compte que ce n’est pas le cas : Mademoiselle a toujours été bénéficiaire, depuis le tout début. Flûte. Que faire ?

Alors Monsieur affirme alors qu’en réalité, si feue la mère de Mademoiselle a inscrit cette dernière en qualité de bénéficiaire, c’est… que Mademoiselle l’avait manipulée. Oui, en 1997, elle ne pouvait qu’être déjà atteinte de la maladie d’Alzheimer (on se demande quand même pourquoi quatre années ont été attendues pour mettre la pauvre Madame sous tutelle).

Ainsi, Monsieur n’hésite pas à affirmer que son épouse était déjà bien atteinte, et que cela seul explique qu’elle se soit laissée berner et aie eu la bizarre idée de rendre sa fille bénéficiaire d’un contrat d’assurance vie. (C’est vrai quoi, quelle idée…)

Autrement dit, Monsieur plaide la démence de Madame afin de profiter du produit de son décès.

Je vous disais bien que c’était charmant.

Curiosité quand tu nous tiens

Depuis désormais un peu plus d’un mois que je tiens ce blog, j’ai pu constater que les billets que j’écris suscitent quelques commentaires. C’est toujours agréable de savoir qu’on est lu !

En revanche, je suis bien curieuse de savoir qui me lit. Le petit outil statistique mis à disposition sur cette plateforme ne répondra jamais à ce type de question.

Voici donc un sondage. Vous êtes libre de répondre. Ou pas. Rien que le nombre de réponses sera intéressant en soi.

Naturellement, c’est anonyme. Attention, une seule réponse possible, choisissez bien.

Merci d’avance.

Image de biens : Peut-on photographier le bien d’autrui ?

Image des biens : Peut-on photographier le bien d'autrui ?On me demandait récemment s’il était possible de faire une photographie d’un bien qui ne vous appartient pas : appartement, maison, voiture…

La question a fait l’objet d’un intense débat voici quelques années concernant l’image des biens, et la solution s’est finalement stabilisée.

Je ne vous fait pas languir davantage : sur le principe, oui, on peut prendre en photo l’image d’un bien.

Il faut cependant faire bien attention à ce que l’on définit comme bien.

Si vous photographiez une œuvre architecturale, un objet d’art, etc… vous aurez des ennuis. Quand je parle d’un bien, c’est la maison du voisin du Tonton Maurice, par exemple. Autrement dit : pas un bien protégé par un droit de propriété intellectuelle : pas une oeuvre.

Dans un premier temps, la Cour de Cassation avait décidé que « le propriétaire a seul le droit d’exploiter son bien, sous quelque forme que ce soit » de sorte que « l’exploitation du bien sous forme de photographies porte atteinte au droit de jouissance du propriétaire ».

Traduction : il était impossible de photographier la maison ou la voiture du voisin du Tonton Maurice. Ennuyeux, car parfois les biens en questions constituaient tout simplement un arrière fond, un paysage de troisième plan. Imaginez l’émoi des photographes…

Cela était en outre juridiquement curieux. En effet, le droit de propriété intellectuelle sur une œuvre de l’esprit est temporaire et il suppose une création. Or le droit de propriété est éternel et suppose simplement un achat. On comprenait mal, dès lors, que le propriétaire d’une chose dispose, au nom de son droit de propriété, d’un droit exclusif sur son image alors même que le fait que la chose ait été prise en photo ne lui portait aucun préjudice.

Certes, on a connu l’affaire de la photographie prise à des fins publicitaires d’une toute petite maison collée contre un rocher sur une île minuscule, et qui a suscité un afflux énorme de touristes dans ce tout petit coin tranquille.

Mais le cas est rare où la photographie d’un bien gêne véritablement le propriétaire de ce dernier.

Et désormais la Cour de Cassation a changé d’avis et c’est heureux.

Elle a ainsi décidé, par arrêt du 7 mai 2004, que « Le propriétaire d’une chose ne dispose pas d’un droit exclusif sur l’image de celle-ci ; il peut toutefois s’opposer à l’utilisation de cette image par un tiers lorsqu’elle cause un trouble anormal ».

La formulation est intéressante. En effet, le propriétaire ne pourra pas s’opposer à la photographie de son bien s’il subit un trouble. Non, il faudra que ce soit un trouble anormal.Autrement dit, un trouble spécifique, particulier.

En l’espèce, il est probable que les habitants de la petite maison sur l’île auraient pu avec la nouvelle jurisprudence s’opposer à la photographie de leur bien, puisqu’ils étaient anormalement dérangés par l’afflux de badauds venus jeter un coup d’œil.

En revanche, les propriétaires d’une maison lambda ne pourront pas prétendre à l’exclusivité de l’image de leur bien au seul motif que c’est la leur, que diable, et qu’ils ne veulent pas que le premier venu la prenne en photo. Même si c’est pour en faire une carte postale.

A ceci près, bien sûr, que le fait de photographier le bien d’autrui ne porte pas atteinte à sa vie privée ni à sa dignité.

Donc, photographes de tous les pays, au travail.

Artistes, pensez à faire un WHOIS

Imaginez.

Monsieur Martin est illustrateur. Et un jour, Ô horreur, il constate sur un site qu’il ne connaît ni d’Eve ni d’Adam que ses images sont exploitées par Monsieur Dupont qui les utilise pour illustrer son site. Pire, ce site est à vocation commerciale, de sorte qu’il n’y a vraiment aucune raison que Monsieur Dupont utilise les images gratuitement puisqu’il fait de l’argent avec son site.

Monsieur Martin a bien envoyé un mail à Monsieur Dupont, mais ce dernier a soigneusement évité de se manifester. Que faire ?

Eh bien, commencez par identifier les coordonnées postales de monsieur Dupont, pour lui envoyer par la poste un petit courrier bien senti.

Et pour cela, rien de plus simple : faites un Whois.

Qu’est ce donc que cette chose ? C’est un service qui permet de savoir le nom et l’adresse du détenteur d’une adresse Internet. Pour cela, vous tapez dans un quelconque moteur de recherche « WHOIS » et vous prenez la première réponse. Dans le champ idoine, tapez le nom de domaine de Monsieur Dupont, par exemple « monsieur-dupont.net » et regardez le résultat.

Une fois que vous avez les coordonnées, vous pouvez envoyer un petit courrier bien senti ou confier ce petit travail à votre avocat.

Copropriété : L’interdiction des atteintes aux parties privatives

Marie Laure Fouché AvocatTous ceux qui habitent en copropriété savent fort bien que les décisions intéressant les parties communes et l’ensemble des copropriétaires doivent être prise à la majorité des copropriétaires réunis lors l’Assemblée Générale, les règles de majorité différant selon le type de décision à prendre. Toutefois, la copropriété, si elle est souveraine pour ce qui est des parties communes, ne peut en aucun cas porter atteintes aux parties privatives, qui sont la propriété exclusive de chaque copropriétaire. 

Ainsi, la loi du 10 juillet 1965 régissant le statut de la copropriété précise que : « L’assemblée générale ne peut, à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance, telles qu’elles résultent du règlement de copropriété ».

Cela signifie que même si tous les copropriétaires sauf vous votent une décision, qui donc recueille une majorité écrasante, cette décision ne peut vous êtres imposée si elle porte atteinte à vos parties privatives. 

Prenons un exemple flagrant. Vous êtes installé au rez-de-chaussée d’un petit immeuble. En raison des nouvelles obligations de tri sélectif, la copropriété a besoin de place pour installer les containers des poubelles. Gênée par l’absence d’espace disponible, elle décide donc de transformer une des pièces de votre appartement en partie commune qui accueillera les containers. 

Sans nul doute, il y a non seulement une modification de la destination d’une partie commune, mais encore pire, une atteinte au droit de propriété, similaire, bien que plus grave, à la situation décrite dans ce billet. 

La copropriété ne peut en aucun cas vous imposer cette décision qui porte atteinte à vos parties privatives. 

Imaginons un autre exemple moins flagrant. Supposons que dans l’immeuble, il soit nécessaire de refaire le réseau de canalisations. Pour cela, l’Assemblée Générale a décidé de faire passer les tuyaux non pas par l’escalier et les parties communes, mais par l’intérieur des appartements. 

Vous avez refusé cette solution en Assemblée car si les canalisations sont posées, elles orneront la salle de bains des autres copropriétaires mais chez vous, elles seront posées dans votre chambre à la tête du lit. Et vous n’avez sûrement pas envie d’entendre des bruits de chasse d’eau à quelques centimètres de votre tête ne permanence, ni de voir des canalisations en plomb prendre de la place dans la pièce. 

Une telle décision est de nature à porter atteinte à la jouissance des parties privatives : l’Assemblée Générale n’a pas le droit de vous l’imposer et si elle le fait, vous pouvez le contester devant le juge avec de bonnes chances de succès. 

Prenons un troisième exemple. La copropriété décide de modifier le réseau de canalisations (encore !). L’effet de cette décision est que soudain, vous n’avez plus d’arrivée d’eau dans votre salle de bains. 

Nul doute que votre partie privative subit une atteinte à sa destination. En effet, la destination du lieu est de permettre aux occupants de se laver. Difficile sans eau… La destination du lieu a donc été modifiée. 

Là encore, il est possible d’attaquer en justice la décision de la copropriété, même si elle a été prise à l’unanimité moins votre vote. 

Attention, cependant. Une fois que le procès verbal de l’Assemblée Générale vous aura été notifié par le syndic, vous n’avez que deux mois pour contester les décisions qu’il convient : ne perdez pas de temps.

L’idée est de libre parcours

Cet adage, qu’on rabâche aux étudiants en cours de propriété intellectuelle à la faculté, n’est pourtant pas très bien assimilé par les créateurs.

Récemment un commentateur curieux me demandait si on pouvait protéger un concept, et si oui, comment.

Hélas (ou heureusement), la réponse est non. En effet, c’est la création qui est protégée par le droit d’auteur. Or l’idée existe avant la création, elle en est le présupposé mais reste distincte. D’autre part, une même idée peut donner lieu à des créations très différentes.

Ainsi, ce qui est protégé, c’est, selon les termes de la loi, « la réalisation, même inachevée, de la conception de l’auteur ». C’est ainsi la formalisation qui est protégée.

Par exemple, mon commentateur me demandait si on pouvait protéger le concept consistant à réaliser un Tshirt avec une tête imprimée dessus. Or il serait ennuyeux que ce concept puisse être protégé.

Le droit de la propriété intellectuelle a en effet pour but de protéger l’auteur d’une œuvre afin que celui-ci puisse l’exploiter, éviter d’être plagié en toute impunité, et ainsi continue à créer. La protection de l’oeuvre est ainsi de nature à favoriser la création.

Or, permettre à quelqu’un de s’approprier une idée aurait l’effet inverse, puisque soudain tout un pan de création deviendrait inaccessible.

En effet, il peut y avoir des quantités de créations consistant à présenter une tête sur un Tshirt, toutes différentes, avec une forme et un style propres : il serait totalement anormal que cette idée soit appropriée par une seule personne. Imaginez que quelqu’un s’approprie le concept et le formalise en imprimant la tête d’Homer Simpson sur le Tshirt. Celui qui voudrait pour sa part imprimer la Joconde serait alors bien embêté…

Maintenant, il est tout à fait possible de créer un type de Tshirt avec une représentation de tête, dans un style particulier. Là, le concept ayant été formalisé, donc la conception étant réalisée, formalisée, la protection est possible.

Par conséquent, ce que tout artiste et créateur doit retenir, c’est que c’est la forme qu’il imprime à sa création qui est protégée, pas l’idée qui sous tend la création.

Et si vous avez une idée géniale que vous voulez mettre en pratique… Un conseil simple : gardez la pour vous tant que vous ne l’avez pas formalisée, ça évitera les ennuis.

Le SMS a valeur de preuve devant les tribunaux

Récemment, Monsieur Dupont m’a narré la fâcheuse mésaventure qui lui était arrivée : 

« Cher Maître, voici mon dilemme. Une mienne amie, fort proche à l’époque mais bien moins depuis, a voulu acheter dans une animalerie un adorable petit chiot. 

Cette dame étant quelque peu dépourvue sur l’instant, j’ai galamment proposé d’avancer le prix d’achat, soit la modique somme de 600 Euros. 

Peu de temps après, cette mégère a plié armes, bagage et chiot, et négligé de rembourser sa dette. 

Vertueusement indigné, je me suis élevé contre ce procédé. La drôlesse, sans se démonter, m’a adressé diverses remontrances orales de fort mauvais aloi, qu’elle a complétées par l’envoi de SMS dont la lecture permet de prouver sans doute aucun l’existence et le montant de ma créance. 

Je suis bien marri ! Je souhaiterais fort récupérer le prix d’achat de la petite bête, mais comment faire entendre raison à la coquine ? »

Eh bien mon cher Monsieur Dupont, il suffit de savoir pour cela que depuis peu, la Cour de Cassation a décidé que le SMS est un mode de preuve admissible devant les tribunaux (Chambre sociale, 2007-05-23, 06-43209). 

Que diable a-t-il bien pu se passer pour qu’on en arrive là ? 

A vrai dire, une situation assez glauque. Une salariée s’est plainte d’avoir subi un harcèlement sexuel de la part de son employeur et a tenté de prouver la chose en utilisant des enregistrements de conversations téléphoniques et des SMS qu’elle avait reçu. 

La preuve par conversation téléphonique a été rejetée, au motif, selon la Cour que «l’enregistrement d’une conversation téléphonique privée, effectué à l’insu de l’auteur des propos invoqués, est un procédé déloyal rendant irrecevable en justice la preuve ainsi obtenue ». 

En revanche, la Cour a précisé qu’il n’en allait pas de même « de l’utilisation par le destinataire des messages écrits téléphoniquement adressés, dits SMS, dont l’auteur ne peut ignorer qu’ils sont enregistrés par l’appareil récepteur ». 

Autrement dit, on ne peut pas utiliser des conversations enregistrées à l’insu (du plein gré) de son interlocuteur. 

En revanche, on peut parfaitement utiliser un SMS, car l’auteur du message sait que ce dernier a vocation à être enregistré et peut être conservé : aucune déloyauté n’est à déplorer ici. 

La meilleure solution en l’espèce est ainsi de se rendre chez un huissier et de lui demander de dresser un constat, faisant état du contenu du SMS et de l’identité de son auteur (ou à tout le moins du numéro de téléphone dont il provient). 

J’ai donc tout de go conseillé à Monsieur Dupont d’aller solliciter le juge de proximité afin de demander le remboursement de la créance, en utilisant comme mode de preuve les SMS en question. 

Reste à voir si l’éminent magistrat donnera suite à la requête…

Contrefaçon et Ebay (II)

Dans un billet récent, j’évoquais l’action engagée par l’Oréal à l’encontre d’Ebay, au motif que cette dernière société serait responsable de la mise en vente par ses membres d’objets contrefaisants.

Là la situation est un peu différente : un acheteur mécontent de s’être fait refourguer une contrefaçon a poursuivi son vendeur.

Cela s’est très mal passé pour ledit vendeur.

Ce dernier n’hésitait pas à vendre des faux sacs Hermès décrits comme « 100% originaux avec certificats et boîtes d’origine ». installé à l’étranger, il adressait les produits à sa mère, installée en France, qui encaissait les paiements et envoyait les produits contrefaits aux acheteurs floués.

Il a été condamné à de la prison ferme, six mois, et à verser 935 Euros à la victime et à indemniser la victime de ses frais d’avocat à hauteur de 500 Euros. Or il est assez rare qu’une contrefaçon, surtout à cette petite échelle, donne lieu à de la prison ferme.

Donc, ce n’est pas parce qu’on est sur Ebay qu’on est dans une zone de non droit et qu’il faut abandonner en cas de problème : voici la preuve qu’une action en contrefaçon bien menée porte ses fruits.

De l’importance d’être loyal

Parfois, on voit arriver un dossier, pas mauvais. Bon, même. Et puis on se rend compte que la pire difficulté qu’on rencontrera, c’est le client.

Petit retour en arrière. Atterrit sur mon bureau voici quelques mois une affaire d’empiètement. Monsieur Dupont est très mécontent car en raison des travaux réalisés sur l’immeuble voisin, il a perdu quelques décimètres carrés du terrain qui entoure sa maison, en proche banlieue parisienne.

Pas de quoi fouetter un chat me direz vous ? D’abord, le droit de propriété, c’est sacré. La preuve : à l’origine, la devise de la France, à la Révolution, c’était « Liberté Egalité Propriété ». La fraternité n’est apparue que plus tard.

Et puis, pas de chance, la perte des décimètres carrés en question empêchent désormais Monsieur Dupont de garer convenablement sa voiture.

La copropriété voisine – qui ne contestait pas sa faute – et Monsieur Dupont ont passé un certain temps à essayer de régler leur différend à l’amiable.

Plusieurs projets, plus ou moins onéreux, ont été envisagés pour remettre les choses en l’état. Un premier projet à minima prévoyait quelques travaux simplissimes. La copropriété voisine l’a voté, mais ne l’a jamais mis en œuvre. Quelques temps plus tard, un autre projet, de meilleure qualité, a été refusé par cette même copropriété, car trop cher à son goût.

Et puis Monsieur Dupont a perdu patience et a intenté une action en justice.

Cela s’est plutôt bien passé, puisque l’immeuble voisin a été condamné à faire les travaux sous astreinte, le Tribunal ayant retenu le premier projet, le plus simple.

Faisant mauvaise fortune bon cœur, la copropriété a finalement décidé de mettre en œuvre le second projet, plus cher, mais qui lui permettait de faire des travaux complémentaires lui bénéficiant aussi à elle et pas seulement à Monsieur Dupont.

Elle prévoit de faire cela en urgence, afin d’éviter le paiement de l’astreinte, et naturellement de prendre en charge la totalité des frais, Monsieur Dupont n’ayant ainsi rien à payer.

Eh bien non. Monsieur Dupont se plaint aujourd’hui de ce que ses voisins vont faire des travaux différents de ceux retenus par le Tribunal, qui je le rappelle avait dans sa modération retenu la solution a minima. Monsieur Dupont est très mécontent parce que ces travaux vont en outre profiter à d’autres que lui, et qu’en raison de leur rapidité d’exécution, il ne percevra probablement aucune somme au titre de l’astreinte.

Il est ainsi fermement décidé à contester la décision prise par les voisins. Qui lui est plus favorable que ce qu’avait décidé le Tribunal. Qui ne lui coûterait pas un seul centime. Et ce afin que seuls les travaux a minima soient réalisés.

Et voilà un bon dossier qui va mal tourner. Parce que devant les tribunaux, la bonne foi et la loyauté sont primordiales ; elles participent du raisonnement juridique lui-même.

Si je vais dire au Juge que mon client conteste la décision de ses voisins, et que je lui explique qu’il veut que ces derniers ne fassent que les travaux à minima, même si les travaux plus complexes ne lui coûtent rien, au mieux il va me rire au nez et rejeter purement et simplement toutes mes demandes.

Au pire, il va constater la mauvaise foi de Monsieur Dupont et le condamner à des dommages et intérêts pour procédure abusive, et à une conséquente indemnité au titre des frais d’avocat exposés par l’adversaire.

Monsieur Dupont ne veut rien entendre. Il veut absolument en découdre une fois de plus, au risque d’être condamné.

C’est pas gagné, tout ça.

La paperasse, c’est bien.

La plupart des gens – à part ces empêcheurs de tourner en rond de juristes – évitent de s’encombrer de papiers divers et variés.

Parce que «oh, de toutes façons, ça ralentirait toute l’opération, on régularisera tout ça ensuite, hein ?», où «mais non, j’ai totale confiance, il n’y aura pas de problèmes, c’est certain».

Alors quand vraiment tout va bien, l’affaire se règle au mieux dans le meilleur des mondes possible, et votre avocat n’entendra jamais parler de l’affaire. Mais comme l’Homme est méchant, souvent, tout va mal et c’est là qu’on commence à avoir des regrets.

Regret de ne pas avoir fait signer son devis par le client, voire même de s’être contenté d’un accord verbal et de n’avoir pas fait de devis du tout. Regret de ne pas avoir fait une copie du courrier qu’on a envoyé à Untel en toute bonne foi et en courrier simple, ou du chèque qu’on a immédiatement encaissé sans arrière pensée. Regret d’avoir formulé de réserves verbales et non écrites à telle ou telle occasion… La liste est sans fin.

Donc, un conseil, qui vous aidera grandement et fera un avocat heureux de plus : faites le maximum de choses par écrit, conservez des archives, faites des copies.

Cela vous évitera, comme cela m’est arrivé ce matin, de voir votre demande rejetée par le Juge au motif que vous ne prouvez pas suffisamment ce que vous affirmez.

Merci d’avance.

Comment témoigner devant les juridictions civiles ?

Récemment, un client un peu angoissé (on peut le comprendre) m’a assuré que plusieurs personnes étaient disposées à témoigner en sa faveur, et qu’il pensait pouvoir les faire venir au Tribunal.

Soyons clairs : on ne témoigne quasiment jamais au civil (ou au prud’hommes, d’ailleurs). Les audiences ne durent jamais très longtemps, et souvent la procédure est écrite. En outre, parfois l’enjeu financier du litige est tel que le juge n’a aucunement l’intention d’écouter qui que ce soit d’autre que les avocats en présence.

Est-ce à dire qu’on ne peut pas du tout témoigner ? Que nenni. Il suffit de le faire par écrit, c’est tout.

Par contre, dans ce cas, il faut le faire bien car des conditions de forme sont imposées.

Donc, si Monsieur Martin est disposé à apporter son témoignage à Monsieur Dupont, ce dernier doit s’assurer que ledit témoignage écrit est conforme.

Tout d’abord, ce témoignage est manuscrit. Eh oui, on n’y coupe pas, mais ça permet au juge d’être raisonnablement sûr que la personne n’a pas signé une document qu’on lui a présenté, et qu’elle est consciente du contenu.

Ensuite, l’attestation doit mentionner les noms et prénoms de Monsieur Martin, sa date et son lieu de naissance ainsi que son domicile.

Monsieur Martin doit ensuite préciser sa profession et quels sont ses liens avec la personne en faveur de qui il témoigne.

Il doit ainsi indiquer s’il est de la même famille, si c’est un ami, un employé, une relation de travail, une vague connaissance, un voisin… Moins Monsieur Dupont et Monsieur Martin sont proches, plus on peut penser que l’attestation est impartiale.

Ensuite vient la formule magique qui, en principe, doit décourager les témoignages de complaisance. Monsieur Martin doit en effet écrire en toutes lettres sur son attestation :

«Je reconnais avoir été informé que la présente attestation est destinée à être produite en justice et que toute fausse déclaration de ma part m’exposerait à des sanctions pénales. Fait pour valoir ce que de droit». 

Ainsi, si Monsieur Martin raconte des calembredaines, il ne pourra pas dire qu’il n’avait pas été averti.

Ensuite, notre témoin peut raconter par le menu ce qu’il a envie de dire en faveur de Monsieur Dupont. De préférence, il doit s’agir de faits qu’il a personnellement constaté. Relater des on-dit est très vivement déconseillé.

Une fois terminé, il ne lui reste plus qu’à dater et à signer.

Et c’est fini… ou presque. Pour que l’attestation soit parfaite, Monsieur Martin doit y joindre la photocopie de sa carte d’identité (ou de son titre de séjour s’il n’est pas français. Eh oui, on n’encourage guère les sans-papiers à témoigner).

Et voilà, c’est fait. Monsieur Dupont dispose désormais d’une preuve qu’il pourra glisser à volonté dans son dossier pour le rendre plus convaincant sans même que Monsieur Martin ait eu besoin de se déplacer le jour de l’audience. Magique.

Nouveaux supports pour la redevance pour copie privée

Afin de compenser la faculté qu’a toute personne d’effectuer une copie privée d’une oeuvre, il existe un système consistant à surtaxer les supports sur lesquels cette copie peut être effectuée.

Par exemple, les DVD vierges voient leur prix augmenté d’une redevance spécifique.

Or, à partir de maintenant, trois nouveaux supports verront leur prix concerné par cette redevance : les cartes mémoires, les disques durs externes et les clés usb.

C’est une solution logique. Autrefois, l’heureux propriétaire qui voulait écouter son vynile à la maison et à la campagne devait acheter deux disques. Aujourd’hui, notre quidam n’a qu’à faire une copie – ou deux, ou trois, ou quatre, ou… bref, vous m’avez comprise.

Par conséquent, il est normal que l’auteur soit indemnisé du fait qu’on achète moins d’exemplaires de son oeuvre. Il est ainsi relativement logique que les supports sur lesquels on peut aisément copier des fichiers soient soumis à la redevance.

C’est cependant une solution qu’on peut regretter vu que les produits en question vont voir leur prix augmenter.

En outre, on pourrait objecter de façon tout à fait valable que ces périphériques peuvent être utilisés à but strictement professionnel, ou à tout le moins ne comporter aucune copie d’oeuvre protégée. C’est probablement pour cette raison que les disques dur internes aux ordinateurs ne sont pas (encore ?) taxés : leur vocation première est de faire fonctionner l’ordinateur et d’abriter les données de l’utilisateur – pas de servir de base de stockage d’oeuvres.

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