Habilitation du syndic à ester en justiceEn matière de copropriété, la question de l’habilitation du syndic à ester en justice, qui ne devrait être qu’une formalité, est un écueil parfois redoutable. 

En effet, le syndic de copropriété a seul qualité pour représenter en justice le syndicat des copropriétaires. Autrement dit, c’est le premier qui agit, en qualité de représentant du second. Or le décret du 17 mars 1955 dispose que le syndic ne peut agir sans y avoir été autorisé par une décision de l’Assemblé Générale des copropriétaires.

Pourquoi est-ce important ? Parce qu’en l’absence d’une telle habilitation, toute partie, durant le procès, peut demander au juge de déclarer irrecevables les demandes formées au nom du syndicat des copropriétaires c’est-à-dire de les écarter sans même les examiner. Il s’agit là d’un moyen de pure procédure, auquel il faut songer lorsqu’on s’oppose aux prétentions d’un syndicat des copropriétaires. 

Les conséquences d’un défaut d’habilitation du syndic sont graves : la demande étant irrecevable, c’est toute la procédure intentée depuis l’origine qui est annulée. Certes, il est loisible au syndic d’intenter immédiatement une nouvelle procédure. Mais, outre que cela occasionne des frais supplémentaires, notamment les honoraires d’avocat, qui auraient pu être évités, encore faut il qu’aucune prescription ne soit intervenue entre temps. En outre, on ne peut plus raisonnablement espérer obtenir le versement de sommes augmentées d’un intérêt calculé à compter de la première demande en justice, qui s’est soldée par une irrecevabilité, mais au mieux à compter de l’introduction de la seconde demande.

A quel moment doit intervenir cette habilitation ? Dans l’idéal, de façon préalable avant le procès. Ainsi, le syndicat des copropriétaires ne court aucun risque. Cela permet en outre d’éviter que l’affaire ne soit ralentie par une demande qui serait formée en cours de procédure. Toutefois, s’il y a eu un oubli, l’Assemblée Générale peut à tout moment couvrir ce vice en prenant une décision d’habilitation, et ce jusqu’au jour de l’audience. 

Dans quels cas doit intervenir l’habilitation ? Elle ne concerne que les instances au fond, et non pas, notamment, les référés. Par exemple, si le syndicat des copropriétaires veut obtenir une somme à titre de provision ou obtenir une mesure particulière justifiée par un dommage imminent l’habilitation n’est pas nécessaire. De même, il n’est pas besoin d’habiliter le syndic dans quelques autres cas, et par exemple, lorsque le syndicat des copropriétaires au lieu de formuler des demandes, est défendeur à l’instance. 

Que doit contenir l’habilitation ? Un certain nombre d’éléments doit figurer dans le procès verbal d’Assemblée Générale pour que l’habilitation soit considérée comme régulière. 

Prenons un exemple extrêmement fréquent, issu du droit de la construction. Le cas de figure est le suivant. Des travaux sont réalisés dans l’immeuble. Divers participants interviennent : un architecte, une ou plusieurs entreprises, un bureau de contrôle… En principe, chacun de ces intervenants doit être assuré pour les travaux qu’il réalise. Suite aux travaux, des désordres sont constatés. Le syndicat des copropriétaires, souhaitant protéger ses droits et oeuvrant pour la conservation de l’immeuble, demande au juge compétent de prononcer une mesure d’expertise (le déroulement d’une expertise fera l’objet d’une note ultérieure). 

Généralement, cela se fait devant le juge des référés. Donc, à ce stade, il n’est pas besoin d’habiliter le syndic. Une fois l’expertise achevée, et les responsables des désordres pointés du doigt par l’Expert, le syndicat des copropriétaires souhaite logiquement intenter une action au fond pour être indemnisé. 

C’est là qu’il convient d’habiliter le syndic à agir en justice, et de façon précise. En effet, l’habilitation doit indiquer exactement de quels désordres le syndicat des copropriétaires souhaite obtenir réparation, et à l’encontre de quelles personnes nommément citées. Si le procès verbal d’Assemblée Générale mentionne seulement les entreprises, l’architecte pourra dire avec raison que le syndic est irrecevable à agir à son encontre. 

Plus compliqué, supposons que le procès verbal mentionne l’architecte, les entreprises, et tous les assureurs de ces derniers sauf un. Cet assureur pourra indiquer que son absence du procès verbal indique que l’Assemblée Générale n’a pas voulu habiliter le syndic à agir à son encontre et aura des chances de se voir donner raison. 

Conclusion : avant d’intenter une action pour le compte d’une copropriété, il convient d’être vigilant et de s’assurer que l’habilitation a été correctement faite, sous peine de voir toute la procédure s’effondrer au dernier moment comme un château de cartes. 

MISE A JOUR (16/11/2011)

Ces dernière années la jurisprudence a un peu évolué sur la question du contenu de l’habilitation. 

Sur le principe, il faut que la résolution d’Assemblée Générale énonce précisément les désordres objet du procès à venir. En revanche il est inutile de préciser à l’encontre de qui, précisément, on veut agir ; il suffit de préciser que cela concerne toutes les personnes concernées par les désordres.

Attention, il faut bien noter que le Syndic n’a pas besoin d’habilitation lorsqu’il s’agir uniquement de se défendre, et non d’attaquer, ni pour recouvrer les charges de copropriété.