L’examen d’une décision de première instance permet souvent de déterminer la suite probable de la procédure, et notamment d’évaluer les chances que l’affaire soit soumise à la Cour d’Appel. 

L’exécution provisoire est alors une question centrale. Je vous invite à lire le billet qui lui est consacré

Pour rappel, l’exécution provisoire qui assortit une décision de justice signifie que même si un recours est formé, on peut avoir le plein effet de la décision, et notamment obtenir le règlement des sommes objet des condamnations. 

Tout d’abord, rappelons que sauf en référé, où l’exécution provisoire est de droit (c’est-à-dire qu’elle intervient toujours, sans qu’on ait besoin de la demander) il faut toujours la demander, et en justifier l’opportunité. 

Rappelons aussi qu’en matière prud’homale, les condamnations portant sur des salaires sont toujours assorties de l’exécution provisoire (heureusement…) 

Supposons maintenant que vous avez une décision qui bénéficie de l’exécution provisoire. Si les condamnations vous profitent, cela signifie que vous pouvez immédiatement réclamer le paiement, si besoin est par voie d’huissier. 

Si la condamnation est contre vous (vous devez payer des sommes d’argent, ou exécuter une prestation) il faut donc savoir que vous serez obligé de payer, même si vous faites appel. 

Donc si votre dossier n’est pas si bon, et que l’appel a de bonnes chances de donner le même résultat que la première instance, le fait de faire appel ne vous permettra pas de gagner du temps. 

Autrement dit, l’intérêt de l’appel – qui entraîne quand même des coûts pas totalement négligeables – est très fortement diminué. Dans ce cas là, autant payer et en finir… Il n’est donc pas très utile stratégiquement, de faire appel, sauf si on pense véritablement avoir une chance de gagner (ou de perdre moins) en appel. 

Donc si vous avez gagné le procès, et que vous avez l’exécution provisoire, vous savez que votre adversaire a peu de chances de faire appel si son dossier n’est pas très bon. En revanche si son dossier reste bon (et que votre victoire s’est jouée de peu…) les chances qu’il fassent appel restent élevées. 

Soulignons dans ce cas que si appel est interjeté, et que le débiteur ne paie pas ce qu’il doit, vous pouvez faire radier son appel. Autrement dit, il ne pourra continuer la procédure d’appel que s’il paie. 

Enfin, exception à la règle, si votre adversaire arrive à démontrer que l’exécution de ses obligations, malgré l’existence d’un appel, risque d’avoir des conséquences manifestement excessives, l’exécution provisoire peut être tout de même suspendue jusqu’à l’issue de l’appel. Dans certains cas, c’est parfaitement justifié ; par exemple, le cas où la condamnation implique la destruction d’une maison ou l’expulsion d’un locataire. Même s’il gagne en appel, le plaideur aura tout perdu : il ne pourra pas récupérer sa maison détruite, ou réintégrer les lieux, sans nul doute loués à d’autres. Pour obtenir la suspension de l’exécution provisoire, il faut toutefois mettre en oeuvre une procédure spécifique. 

Voyons maintenant ce qui se passe s’il n’y a pas d’exécution provisoire. 

En cas d’appel, tout est arrêté jusqu’à l’issue de la procédure d’appel. Autant dire qu’il vaut mieux faire courir très vite les délais d’appel et prier pour qu’il ne se passe rien

Donc si la décision n’est pas assortie de l’exécution provisoire, les chances qu’il y ait un appel sont bien plus importantes puisqu’outre la possibilité que la décision d’appel soit plus favorable au perdant, cela lui offre automatiquement un délai non négligeable. 

Ce n’est pas pour autant une raison pour faire systématiquement appel, peu important la qualité du dossier. Faire appel avec un dossier très mauvais, c’est s’exposer à perdre de nouveau, voire davantage, tout en payant à l’adversaire ses frais d’avoué (de façon certaine), ses frais d’avocat (de façon probable) et parfois même des dommages et intérêts pour procédure abusive. 

Prudence, donc.