Peut-on se passer de l'Expertise judiciaire ?Souvent, en matière de désordres à la construction, on demande qu’un Expert soit désigné. Mais est-ce obligatoire ? En effet, compte tenu des délais et coûts d’unetelle mesure, il est tentant de sauter la case « expertise » pour aller directement à la case « procès ». 

La réponse doit être nuancée selon les dossiers, mais très souvent, une expertise judiciaire diminue les risques d’échec de la procédure d’indemnisation. 

Je m’explique : la construction est un domaine éminemment technique, très complexe. Pour obtenir une indemnisation dans l’hypothèse où l’on subit des désordres, il faut ramener la preuve de plusieurs éléments. 

Il faut d’abord prouver que le désordre est subi, ensuite quelle est son étendue et les coûts réparatoires, et enfin établir les responsabilités. 

Pour ce qui est de prouver le désordre, il est relativement aisé de le faire à l’aide d’un simple constat d’huissier. 

En revanche, rapporter la preuve du reste (étendue, coûts, responsabilités) est fort difficile pour le profane. Il n’est ainsi pas évident, en général, de distinguer si tel problème est normal, ou résulte d’un défaut de construction, de déterminer s’il est esthétique ou décennal (ce qui conditionne le droit applicable), et d’établir qui est véritablement responsable parmi la pléthore d’intervenants (entreprise, architecte, bureau d’études, bureau de contrôle, promoteur, coordinateur ?…). 

Quand bien même le Maître d’Ouvrage serait averti, voire notoirement compétent (promoteur…) le Tribunal ne peut se satisfaire des dires de ce dernier pour condamner des constructeurs à l’indemniser. 

Il y a donc le problème d’expliquer les aspects techniques du dossier au Tribunal, mais également le problème de l’impartialité de l’exposé technique. 

Dans ces conditions, il est souvent particulièrement difficile de contourner l’expertise, malgré ses inconvénients (essentiellement, son coût et sa durée). 

Toutefois, il est parfois aisé de rapporter la preuve (constat d’huissier parfaitement clair, responsabilité évidente du seul intervenant sur place…) et l’expertise peut être évitée. Il reste néanmoins toujours un risque que le Tribunal s’estime insuffisamment informé et rejette la demande faute de preuves. 

Lorsque l’avocat envisage pour la première fois un dossier de désordres à la construction, il est donc important de déterminer s’il est essentiel de demander une expertise. Souvent, c’est le cas. 

Pour aller plus loin sur la demande d’expertise, consulter ce billet.