La question m’est très souvent posée, de savoir si un lot désigné d’une façon dans le Règlement de Copropriété, peut être utilisé différemment. Autrement dit,  peut-on changer son affectation.

Par exemple, on me demande si une cave peut être utilisée comme une salle de bains, si une remise peut être utilisée comme bureau, ou encore des combles aménagés en chambre.

En définitive, cela revient à poser la question de l’affectation du lot, autrement dit de son utilisation réelle, par comparaison avec la désignation du lot figurant au Règlement de Copropriété.

Pour répondre à la question, il faut d’abord aborder la notion de destination de l’immeuble.

La destination de l’immeuble est l’usage global auquel il est consacré. Il peut s’agir par exemple d’une destination d’habitation, commerciale, professionnelle, industrielle, scolaire, hospitalière… Le plus souvent les immeubles en copropriété ont une destination d’habitation, parfois mixte avec également une destination professionnelle (professions libérales, bureaux…) et/ou commerciale.

Normalement, cette destination est inscrite clairement dans le Règlement de Copropriété. Dans les copropriétés les plus anciennes, cela peut ne pas être le cas et elle se déduira de la typologie des lots. Par exemple, un immeuble avec des logements dans les étages et des boutiques au rez-de-chaussée aura une destination mixte d’habitation et commerciale.

Cette notion de destination est très importante en copropriété, à tel point qu’elle ne peut être changée en Assemblée Générale que par un vote à l’unanimité de tous les copropriétaires. En outre la liberté d’usage des parties communes n’est, essentiellement, limitée que par le respect de la destination, comme le précise l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965, selon lequel:

« Chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l’immeuble ».

Ceci étant précisé, revenons-en à la question de l’affectation, donc de l’usage réel du lot.

La règle est simple: on peut affecter ses parties privatives essentiellement comme on le souhaite, dans le respect de la destination de l’immeuble, et naturellement pour peu que l’on ne porte pas atteinte aux droits des autres copropriétaires.

Donc, si par exemple la destination de l’immeuble est l’habitation, on ne peut utiliser un lot pour une activité industrielle (sauf à ce que l’Assemblée Générale l’autorise à l’unanimité de tous les copropriétaires).

En revanche, dans le même immeuble d’habitation, on peut vouloir aménager des combles ou une remise en habitation. Pour peu que ces lots aient une configuration compatible avec l’habitation (fenêtre…) et respectent les normes d’habitabilité ce changement est libre et ne nécessite aucune autorisation en Assemblée Générale.

Cela peut s’appliquer aussi à d’autres lots « accessoires » comme des chambres de service.

En revanche, concernant une cave, il faut être prudent, essentiellement car elle n’aura souvent pas les caractéristiques techniques propres à l’habitabilité.

Enfin, n’oublions pas la question des bureaux. Peut-on les transformer en habitation librement ? Si l’immeuble a, outre sa destination professionnelle (de bureau) une destination également d’habitation, oui. En effet, transformer un bureau en logement, dans un immeuble notamment d’habitation ne pose aucune difficulté pour la destination, et a priori non plus pour les droits des autres copropriétaires.

Ceci étant précisé, il faut souligner que ce changement d’affectation, tel que décrit ici, concerne le droit de la copropriété. Ces règles ne dispensent donc pas le copropriétaire, de respecter les règles d’urbanisme. Notamment, il peut être interdit par la commune de transformer des logements en bureaux.

Enfin, outre le respect de la destination, il faut s’assurer que le Règlement de Copropriété ne contient pas de dispositions spécifiques sur le sujet, et qui seraient contraires au changement d’affectation. Par exemple, le Règlement de Copropriété va souvent interdire que certains lots d’habitation ne soient transformés en commerces ou bureaux. Dans un tels cas, le respect du Règlement de Copropriété s’impose.

Cependant, il faut souligner que récemment, la Cour de Cassation a assoupli cette position. 

Ainsi, au titre d’un arrêt du 6 juillet 2017, elle décide que dans le cas où le Règlement de Copropriété donne expressément, dans son texte, valeur contractuelle à l’état descriptif de division, celui-ci doit être pris en compte.

Ainsi, dans une telle hypothèse, l’affectation du lot, telle que mentionnée dans l’état descriptif de division, doit être respectée. De la sorte, l’état descriptif de division a dans cette hypothèse valeur contractuelle, comme le reste du Règlement de Copropriété, et on ne peut librement changer l’affectation des lots, même si on respecte la destination globale de l’immeuble.

Dans ce cas d’espèce de l’arrêt de la Cour de Cassation, alors qu’il était mentionné, globalement, que les lots pouvaient être utilisé tant en habitation que professionnellement, l’état descriptif de division mentionnait expressément des appartements dans les étages, et non des bureaux.

L’arrêt de Cour d’Appel retenait, en pratique, que l’état descriptif de division était mentionné au titre du chapitre « désignation » du Règlement de Copropriété de sorte qu’il avait valeur contractuelle.

La Cour de Cassation, comme la Cour d’Appel, a considéré que l’état descriptif de division, plus précis car évoquant les lots individuellement, devait être suivi et que malgré la clause globale, l’affectation des lots devait respecter l’état descriptif de division.

Il faut donc être vigilant aux termes du Règlement de Copropriété et voir s’il donne expressément valeur contractuelle à l’état descriptif de division.

 

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