Avocat en construction et copropriété

Étiquette : exécution provisoire

Le titre exécutoire

En matière de décision de justice, il est utile de savoir ce qu’est un titre exécutoire.

C’est particulièrement intéressant car le titre exécutoire et le document qui vous permet d’obtenir, de force, une exécution.

Par exemple, vous avez entre les mains une reconnaissance de dette. C’est intéressant, mais cela ne vous permettra pas en soi d’obtenir le remboursement de votre créance, si votre débiteur est récalcitrant.

Remettre votre reconnaissance de dette à un huissier pour obtenir votre remboursement ne servira à rien. Pour obtenir un règlement, vous devez avoir en mains un titre exécutoire. Votre reconnaissance de dette prouvera simplement votre prétention.

La règle est la suivante, édictée par l’article L 111-2 du code des procédures civiles d’exécution:

« Le créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d’exécution ».

Donc avec un titre exécutoire, vous pouvez saisir un huissier, qui poursuivra votre débiteur jusqu’à récupération des sommes dues.

Il est donc nécessaire de savoir ce qu’est un titre exécutoire.

Cette notion est définie par l’article L 111-3 du même code des procédures civiles d’exécution.

Sont des titres exécutoires les éléments suivants :

« 1° Les décisions des juridictions de l’ordre judiciaire ou de l’ordre administratif lorsqu’elles ont force exécutoire, ainsi que les accords auxquels ces juridictions ont conféré force exécutoire »;

Autrement dit, les jugements ou arrêts, qu’ils soient rendus par des tribunaux civils, pénaux ou administratifs. On dit d’un tel titre qu’il a force exécutoire dans la mesure, tout simplement, où il peut être exécuté.

Il s’agit par exemple des décisions assorties de l’exécution provisoire, des arrêts de Cour d’Appel (qui sont exécutoires, même si on forme un pourvoi en cassation), ou des ordonnances de référé.

Il s’agit également des transactions qui ont été homologuées.

« 2° Les actes et les jugements étrangers ainsi que les sentences arbitrales déclarés exécutoires par une décision non susceptible d’un recours suspensif d’exécution, sans préjudice des dispositions du droit de l’Union européenne applicables »

Il s’agit, naturellement, des décisions étrangères qui peuvent être exécutées en France, et ce suite à une procédure d’exequatur.

« 3° Les extraits de procès-verbaux de conciliation signés par le juge et les parties »

Cas où au lieu d’un jugement entre parties, celles-ci opèrent une conciliation en présence du juge.

« 4° Les actes notariés revêtus de la formule exécutoire »

Par exemple, un bail notarié.

« 4° bis Les accords par lesquels les époux consentent mutuellement à leur divorce par acte sous signature privée contresignée par avocats, déposés au rang des minutes d’un notaire selon les modalités prévues à l’article 229-1 du code civil »

Cette disposition permet de mettre en oeuvre un divorce sans passage devant le juge.

« 5° Le titre délivré par l’huissier de justice en cas de non-paiement d’un chèque ou en cas d’accord entre le créancier et le débiteur dans les conditions prévues à l’article L. 125-1« .

Point intéressant: l’huissier peut délivrer un titre exécutoire en cas de chèque sans provision. Dans ce cas, il pourra utiliser ce titre pour procéder à des mesures d’exécution contre la personne qui a émis le chèque: saisies de compte bancaire, de biens mobiliers…

« 6° Les titres délivrés par les personnes morales de droit public qualifiés comme tels par la loi, ou les décisions auxquelles la loi attache les effets d’un jugement »

Il s’agit de titre très divers. Leur seule caractéristique commune est que leur émetteur est soit l’État, soit une collectivité territoriale soit un  établissement public doté d’un comptable public. Il s’agit essentiellement des impôts, amendes, recettes domaniales…

 

Enfin, dernier point: il faut souligner qu’en principe, le délai pour exécuter un titre exécutoire est de dix ans, sauf le cas où les actions en recouvrement des créances qui sont constatées dans ledit titre exécutoire se prescrivent par un délai plus long.

 

 

Jugement, ordonnance, exécution provisoire : astuces de compréhension et de stratégie

L’examen d’une décision de première instance permet souvent de déterminer la suite probable de la procédure, et notamment d’évaluer les chances que l’affaire soit soumise à la Cour d’Appel. 

L’exécution provisoire est alors une question centrale. Je vous invite à lire le billet qui lui est consacré

Pour rappel, l’exécution provisoire qui assortit une décision de justice signifie que même si un recours est formé, on peut avoir le plein effet de la décision, et notamment obtenir le règlement des sommes objet des condamnations. 

Tout d’abord, rappelons que sauf en référé, où l’exécution provisoire est de droit (c’est-à-dire qu’elle intervient toujours, sans qu’on ait besoin de la demander) il faut toujours la demander, et en justifier l’opportunité. 

Rappelons aussi qu’en matière prud’homale, les condamnations portant sur des salaires sont toujours assorties de l’exécution provisoire (heureusement…) 

Supposons maintenant que vous avez une décision qui bénéficie de l’exécution provisoire. Si les condamnations vous profitent, cela signifie que vous pouvez immédiatement réclamer le paiement, si besoin est par voie d’huissier. 

Si la condamnation est contre vous (vous devez payer des sommes d’argent, ou exécuter une prestation) il faut donc savoir que vous serez obligé de payer, même si vous faites appel. 

Donc si votre dossier n’est pas si bon, et que l’appel a de bonnes chances de donner le même résultat que la première instance, le fait de faire appel ne vous permettra pas de gagner du temps. 

Autrement dit, l’intérêt de l’appel – qui entraîne quand même des coûts pas totalement négligeables – est très fortement diminué. Dans ce cas là, autant payer et en finir… Il n’est donc pas très utile stratégiquement, de faire appel, sauf si on pense véritablement avoir une chance de gagner (ou de perdre moins) en appel. 

Donc si vous avez gagné le procès, et que vous avez l’exécution provisoire, vous savez que votre adversaire a peu de chances de faire appel si son dossier n’est pas très bon. En revanche si son dossier reste bon (et que votre victoire s’est jouée de peu…) les chances qu’il fassent appel restent élevées. 

Soulignons dans ce cas que si appel est interjeté, et que le débiteur ne paie pas ce qu’il doit, vous pouvez faire radier son appel. Autrement dit, il ne pourra continuer la procédure d’appel que s’il paie. 

Enfin, exception à la règle, si votre adversaire arrive à démontrer que l’exécution de ses obligations, malgré l’existence d’un appel, risque d’avoir des conséquences manifestement excessives, l’exécution provisoire peut être tout de même suspendue jusqu’à l’issue de l’appel. Dans certains cas, c’est parfaitement justifié ; par exemple, le cas où la condamnation implique la destruction d’une maison ou l’expulsion d’un locataire. Même s’il gagne en appel, le plaideur aura tout perdu : il ne pourra pas récupérer sa maison détruite, ou réintégrer les lieux, sans nul doute loués à d’autres. Pour obtenir la suspension de l’exécution provisoire, il faut toutefois mettre en oeuvre une procédure spécifique. 

Voyons maintenant ce qui se passe s’il n’y a pas d’exécution provisoire. 

En cas d’appel, tout est arrêté jusqu’à l’issue de la procédure d’appel. Autant dire qu’il vaut mieux faire courir très vite les délais d’appel et prier pour qu’il ne se passe rien

Donc si la décision n’est pas assortie de l’exécution provisoire, les chances qu’il y ait un appel sont bien plus importantes puisqu’outre la possibilité que la décision d’appel soit plus favorable au perdant, cela lui offre automatiquement un délai non négligeable. 

Ce n’est pas pour autant une raison pour faire systématiquement appel, peu important la qualité du dossier. Faire appel avec un dossier très mauvais, c’est s’exposer à perdre de nouveau, voire davantage, tout en payant à l’adversaire ses frais d’avoué (de façon certaine), ses frais d’avocat (de façon probable) et parfois même des dommages et intérêts pour procédure abusive. 

Prudence, donc.

L’exécution provisoire

Dans un précédent billet consacré au décryptage d’un jugement, j’évoquais l’exécution provisoire. 

Il est temps d’y revenir. 

Pour expliquer de quoi il s’agit, il faut faire un petit détour par les voies de recours qui sont offertes au justiciable. 

Autrement dit, lorsque le justiciable dispose d’une décision de première instance (Tribunal d’Instance ou de Grande Instance, Tribunal de commerce, conseil des prud’hommes…) il peut considérer qu’elle ne lui convient pas, et décider d’exercer une voie de recours. 

Généralement, il s’agira de faire appel. 

Or, en principe, lorsqu’on fait appel, les conséquences du jugement sont suspendues jusqu’à ce que les juges d’appel aient statué. 

D’où le fait que de nombreux « perdants », afin de gagner du temps, font appel, sans toutefois avoir de grandes chances de gagner, juste afin d’éviter d’avoir à payer les sommes auxquelles ils ont été condamnés. 

Pour le « gagnant », c’est fort ennuyeux puisqu’après avoir gagné son affaire… il doit tout recommencer. 

Sauf s’il a obtenu l’exécution provisoire. 

Grâce à l’exécution provisoire, celui au bénéfice duquel des condamnations ont été prononcées peut exécuter la décision, même si son adversaire fait appel. 

Ce qui, bien entendu, diminue fortement pour l’adversaire l’intérêt de faire appel, qui ne permet plus de gagner du temps. 

Du coup, l’appel ne sera généralement interjeté que par celui qui croit vraiment avoir une chance de gagner en appel ce qu’il a perdu en première instance. 

Par conséquent, il est particulièrement intéressant, quand on lit le dispositif d’un jugement, de vérifier si l’exécution provisoire a été ordonnée. 

Si c’est le cas, vous pouvez directement envoyer la décision chez l’huissier pour obtenir les condamnations. 

Ah, un petit détail. Les décisions prises en référé bénéficient de droit de l’exécution provisoire. Intéressant, non ?

Que retenir d’un Jugement ?

Dans un billet précédent intitulé « assignation mode d’emploi » j’évoquais les éléments présents dans cet acte et la façon de les comprendre.

Passons désormais au Jugement.

En effet, une décision de justice, que l’on appellera « Jugement » par commodité (il peut s’agir d’un arrêt, d’une ordonnance…) comporte différentes parties qui ont une plus ou moins grande importance. Un décryptage s’impose il n’est pas évident de s’y retrouver dans une décision parfois touffue.

Tout d’abord : si le jugement que vous avez entre les mains est issu d’une procédure dans laquelle vous avez été représenté par un avocat, demandez lui des explications claires, il est là pour ça.

Voyons ensuite la structure de la chose.

Un jugement, pour faire simple, rappelle le nom des parties (première page), récapitule ce que les parties demandent, explique ensuite l’avis du Tribunal sur lesdites demandes, pour donner ensuite la décision prise.

Le nom des parties : pas de problème. Toutefois, sous leur nom, on peut voir le nom de leur avocat s’ils en ont un, si les parties sont venues en personnes, ont été totalement absentes de la procédure… Cela peut paraître anodin mais lorsqu’il s’agit d’exécuter la décision ou de faire appel, je peux vous dire qu’il est très important de déterminer si la partie était présente, absente, ou considérée comme présente malgré son absence.

Tiens, d’ailleurs ceci fera l’objet d’une petite explication dans un autre billet, c’est intéressant. Si, si.

Ensuite, le Tribunal rappelle ce que chacun a demandé, par oral ou dans ses écritures.

Attention ! Ce n’est pas parce que le Tribunal rappelle les prétentions des Parties au procès dans le jugement qu’il va accorder les demandes sollicitées. Ainsi, ce n’est pas parce que votre adversaire demande une condamnation sous astreinte de 500 Euros par jour de retard que le Tribunal va lui accorder. Donc, pas de panique, ne confondez pas cette partie avec la décision prise par le Tribunal.

Ensuite, et là, cela devient intéressant (surtout pour l’avocat qui a envie de voir si les juges ont suivi son argumentation…), le Tribunal donne son avis.

Il faut bien distinguer le moment où il cesse d’exposer ce que demandent les parties pour exposer son point de vue. La Cour d’appel indiquera souvent la formule suivante : « Sur ce, la Cour : », pour exposer ensuite son avis. La présence d’un « Sur ce », dans toute décision, est un indice sûr.

Cette partie est intéressante, car elle explique la raison pour laquelle la juridiction a statué dans un sens où dans un autre. On l’appelle les motifs de la décision. En cas d’appel, par exemple, ce sont ces motifs que votre avocat retiendra pour les contester.

Une fois que le Tribunal a expliqué pourquoi il prenait telle ou telle décision, vient la décision elle même.

C’est la partie la plus importante du jugement, elle est à la fin. On l’appelle le « dispositif ».

Elle est facile à repérer : elle commence toujours par l’expression : « Par ces motifs », ce qui signifie en réalité : « par ces motifs (c’est-à-dire l’avis exposé plus haut que je viens d’évoquer), le Tribunal prend la décision qui suit ».

Donc, pour savoir ce qu’ont décidé les juges, commencez par la dernière page, et repérez la partie commençant par « par ces motifs ».

Prenez une bonne inspiration, et lisez. A la limite, ne lisez que le dispositif, le reste n’est que de l’enrobage.

Le dispositif indique généralement si le Tribunal condamne l’une ou l’autre des parties, ou s’il rejette les demandes.

Il indique si la décision rendue peut être immédiatement exécutée, même si l’autre partie décide d’en faire appel. Dans un tel cas, on peut lire la formule: « ordonne l’exécution provisoire de la présente décision ». Une exécution provisoire est très avantageuse, et j’expliquerai pourquoi dans un billet ultérieur.

Le Tribunal précise en outre si l’une ou l’autre partie est condamnée à supporter tout ou partie des frais d’avocat de l’autre, comme je l’expliquais dans ce billet.

Enfin, le Tribunal statue sur les dépens, au sujet desquels j’ai consacré un billet.

Maintenant, certains jugements sont particulièrement complexes. Interrogez votre avocat…

© 2024 Marie Laure Fouché

Theme by Anders NorenUp ↑