Avocat en construction et copropriété

Mois : janvier 2012

La rupture brutale des relations commerciales établies (II)

EA182319-3971-4D32-AE43-415665A7E03D.image_600Comme promis, voici la suite des développements concernant la rupture brutale des relations commerciales établies. 

Passons donc aux deux autres critères. 

Sur l’absence de préavis écrit 

Sur ce point, il est important de savoir tout d’abord que nul ne peut être contraint de poursuivre un lien contractuel ad vitam aeternam. C’est la règle de l’interdiction des contrats perpétuels. 

Ainsi, toute personne qui a conclu un contrat doit pouvoir s’en retirer. De la sorte, Papeterie a absolument le droit de cesser de travailler avec Dubois. L’important, c’est que Papeterie opère cette cessation des relations commerciales dans le respect des obligations inscrites dans la loi, avec loyauté. 

Dès lors, si Papeterie veut cesser de travailler avec Dubois, elle doit nécessairement le lui notifier par écrit. C’est ainsi la troisième condition. 

Cette règle s’explique notamment par le fait que l’absence d’écrit est de nature à caractériser le caractère brutal de la rupture. Ainsi, l’absence d’écrit est un indice du caractère brutal de la rupture. 

En revanche, il faut retenir que la loi n’impose pas que la notification de la rupture contienne une motivation. 

En effet, comme je l’indiquais plus haut, un partenaire commercial est libre de rompre une relation et n’a pas à en justifier. 

Il faut cependant bien comprendre, à ce sujet, que dans certains cas, le partenaire commercial qui rompt la relation peut motiver sa décision, et que parfois cette motivation justifie la rupture de sorte que celui qui subit cette dernière ne sera pas indemnisé. 

Cela s’explique par une raison simple, à savoir la faute de celui qui subit la rupture. 

Dans mon exemple, Papeterie notifie la rupture avec effet immédiat à Dubois, et motive cette rupture par le fait que cette entreprise lui a livré des matériaux inutilisables, ou encore a cessé de la livrer sans raison. Autrement dit, la faute de Dubois peut tout à fait justifier la rupture de la part de Papeterie. 

Ainsi, celui qui rompt les relations commerciales doit notifier le préavis par écrit. Mais il doit également, dans cette notification écrite, prévoir une durée de préavis suffisamment longue. 

Sur la durée du préavis 

Ainsi, la rupture n’est valable que si la durée du préavis est suffisamment longue eu égard aux relations commerciales passées. C’est la quatrième condition. 

Tout d’abord, le préavis peut être fixé dans le contrat liant les partenaires commerciaux. Si ce n’est pas le cas, il appartient au Juge saisi du litige d’apprécier souverainement le caractère raisonnable du délai. 

Deux hypothèses, donc. Commençons par le cas d’un préavis prévu dans le contrat. 

Si tel est le cas, le préavis contractuellement prévu devra être respecté. S’il est un peu court à votre avis, tant pis. En général, la Cour de Cassation considère en effet qu’il faut respecter la durée du préavis qui a été convenu entre les parties, à moins qu’il ne soit ridiculement court (préavis de deux semaines alors que les relations commerciales durent depuis trente ans). 

En l’absence de tout préavis prévu contractuellement, le juge saisi du litige statue en tenant compte de la durée des relations commerciales, de la nature des produits et services concernés, de l’importance financière des relations commerciales ou encore des investissements réalisés au profit de l’auteur de la rupture. 

En effet, le préavis a pour objet de permettre au partenaire commercial délaissé de prendre ses dispositions afin de se diversifier ou de solliciter une nouvelle clientèle. 

En outre, le Juge pourra également tenir compte du temps nécessaire à réorienter l’activité vers de nouveaux clients et de l’état de dépendance économique de celui qui subit la rupture. 

Arrêtons nous un instant sur cette question de l’état de dépendance économique car il peut conditionner l’importance des sommes obtenues en justice. 

Rien ne vaut l’illustration par l’exemple, aussi, retournons du côté de Papeterie et de Dubois. 

Premier exemple : Papeterie occasionne un tiers du chiffre d’affaires de Dubois. Le juge indemnisera Dubois qui est dans une situation «moyenne» de dépendance économique. 

Second exemple : Papeterie est le seul et unique client de Dubois. La rupture des relations signifie alors pour Dubois la clé sous la porte. 

Là, il faut distinguer. 

Supposons que Papeterie a fait en sorte que Dubois ne travaille que pour elle (par le biais d’un accord d’exclusivité, par exemple). En cas de rupture brutale, le juge sera impitoyable pour Papeterie, car elle a créé une relation de dépendance très forte pour ensuite agir à l’encontre de Dubois avec une grande déloyauté. 

Supposons au contraire que Papeterie soit le seul client de Dubois, mais parce que Dubois, par paresse, ne s’est pas donné la peine d’aller chercher d’autres clients. Certes, le juge indemnisera Dubois… mais moins que dans les autres cas. 

En effet, le juge considèrera que dans cette hypothèse, Dubois a en quelque sorte a concouru à son propre préjudice en s’exposant au risque de brusque rupture de la part de Papeterie. 

Ainsi, celui qui s’est délibérément placé « sous la tutelle » d’une grande entreprise et dont la dépendance relève d’un choix stratégique sera moins indemnisé. 

A ce stade, il convient de s’interroger sur la forme que doit prendre l’indemnisation, et sur la caractérisation du préjudice. 

Mais il se fait tard, et ceci fera l’objet d’un dernier billet sur la question. 

Image CarbonNYC

Licence Creative Commons

La rupture brutale des relations commerciales établies (I)

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Voyons aujourd’hui les règles relatives à la rupture brutale des relations commerciales établies.

Vous avez très certainement entendu parler du déréférencement et des difficultés qu’il entraîne pour les producteurs privés soudainement de débouchés. 

Ainsi, du jour au lendemain, la centrale d’hypermarchés qui commercialisait vos yaourts bio a décidé de vous retirer de ses rayons et soudain, vous n’avez plus de clients ou presque. 

Ce comportement a suffisamment ému l’opinion publique – et à juste titre – pour que des dispositions soient intégrées dans la loi afin de protéger le producteur qui subit ainsi de la part de son principal client une rupture brutale des relations commerciales. 

Mais ce qu’il faut savoir, c’est que cette loi est rédigée en des termes suffisamment larges pour qu’elle puisse profiter à bien d’autres que les fournisseurs des supermarchés. 

Ainsi, elle concerne toute relation commerciale établie depuis un certain temps (qui se compte quand même en années) entre une personne qui fournit des biens et des services et son client qui décide brusquement de ne plus travailler avec elle. 

Celui qui perd ainsi son client principal peut être un commerçant exerçant en son nom, une société, voire même une association : tant qu’il y a relation commerciale établie, la loi a vocation à s’appliquer. 

Ainsi, le partenaire commercial qui se voit imposer une telle rupture est en droit de solliciter l’indemnisation du préjudice qu’il subit, à condition de prouver qu’il remplit les critères édictés par la loi, dans le cadre d’une action en rupture brutale des relations commerciales établies. 

Ces critères sont au nombre de quatre : existence d’une relation commerciale établie, suivie par une rupture brutale, intervenue sans notification écrite, comportant la mention d’un préavis tenant compte de la durée des relations commerciales. 

Si ces critères sont présents, il convient alors de s’interroger sur la forme et le montant de l’indemnisation, et sur le type de préjudice à indemniser. 

Sur l’existence d’une relation commerciale établie 

La première condition consiste à prouver l’existence de la relation commerciale. Le texte de loi protégeant la victime de la brusque rupture s’applique quel que soit le type de relation commerciale : fourniture de produits, prestations de services… 

La qualification juridique du ou des contrats conclus entre les partenaires commerciaux importe peu : il peut ainsi s’agir d’un seul et unique contrat à durée indéterminée ou d’une série de contrats ponctuels à durée déterminée. 

Le critère déterminant est ici le caractère stable, suivi et régulier de la relation commerciale. 

Prenons un exemple concret. L’entreprise Dubois fournissait depuis des années à la société Papeterie des morceaux de bois pour que cette dernière puisse fabriquer son papier. 

Il faudra alors démontrer, à l’aide de contrats, factures, etc…, l’existence de la relation suivie entre les deux entreprises. 

Sur la rupture brutale 

La seconde condition consiste à établir qu’il y a eu rupture, et surtout qu’elle a été brutale. 

La rupture sera qualifiée de brutale si elle intervient sans que soit respecté un préavis suffisant compte tenu de l’ancienneté de la relation commerciale. 

Autrement dit, il s’agit de la rupture du jour au lendemain, qui est tellement rapide qu’elle empêche sa victime de se retourner pour trouver de nouveaux débouchés. 

Les juridictions retiennent ainsi régulièrement la rupture « imprévisible, soudaine et violente ». C’est ainsi la déloyauté du partenaire commercial qui est stigmatisée et sanctionnée. 

Cette rupture peut être totale ou partielle : la réduction drastique du courant d’affaires entre Dubois et Papeterie peut suffire. 

En principe elle est aisée à prouver : soudain, plus de contrats, plus de factures… et parfois l’auteur de la rupture envoie un courrier qui également peut prouver la réalité de la rupture. 

Que voici déjà un long billet. Je traiterai ainsi dans un billet ultérieur des deux autres critères de la rupture brutale des relations commerciales établies. 

Image Toronja Azul

Licence Creative Commons

Majorité pour autoriser une surélévation de l’immeuble en copropriété

Comme je l’ai déjà exposé précédemment, tous travaux sur parties communes en copropriété doivent faire l’objet de votes en assemblée générale selon diverses majorités

S’il s’agit de travaux d’entretien, par exemple, c’est la majorité de l’article 24 de la loi de 1965. S’il s’agit de travaux sur parties communes demandés par un copropriétaire, c’est la majorité de l’article 25

Si ces travaux ont pour effet d’annexer une partie commune (par exemple un palier devient une partie privative) c’est la majorité de l’article 26. 

Mais dans certains cas, il s’agit pour la copropriété de s’interroger sur la possibilité de surélever l’immeuble, généralement pour créer de nouvelles parties privatives. 

Dans ce cas, la solution, résulte de l’article 35 de la loi de 1965. Attention toutefois ! Cet article a été modifié en profondeur par la loi ALUR. 

Dans sa rédaction antérieure désormais obsolète, l’article 35 précisait:

« La surélévation ou la construction de bâtiments aux fins de créer de nouveaux locaux à usage privatif ne peut être réalisée par les soins du syndicat que si la décision en est prise à l’unanimité de ses membres ». 

A présent, la solution est différente puisque l’article 35 dans sa nouvelle rédaction résultant de la loi ALUR prévoit : 

La surélévation ou la construction de bâtiments aux fins de créer de nouveaux locaux à usage privatif ne peut être réalisée par les soins du syndicat que si la décision en est prise à la majorité prévue à l’article 26.

Il ne s’agit donc plus de l’unanimité mais de la majorité des deux tiers des copropriétaires.

En outre si surélévation il y a et que des copropriétaires subissent un préjudice, ils ont droit à une indemnité (article 36). 

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