Avocat en construction et copropriété

Mois : mars 2014

Responsabilité contractuelle : les obligations de moyen et de résultat

J’évoquais dans un article récent la différence entre la responsabilité délictuelle et la responsabilité contractuelle.

Responsabilité contractuelle : les obligations de moyen et de résultatDans le présent billet, je souhaite développer un peu plus le principe de responsabilité contractuelle et ce qu’il recouvre, en abordant la distinction entre les obligations de moyen et de résultat.

Comme je le précisais dans l’autre article, le principe de la responsabilité contractuelle est assez simple : cette responsabilité est engagée si la personne qui s’est obligée, par contrat, à faire quelque chose, ne respecte pas cette obligation, sachant qu’elle ne peut dégager sa responsabilité que si elle prouve une cause étrangère, généralement une force majeure (qui fera l’objet d’un autre article).

Ceci étant, il y a deux degrés possibles pour définir l’obligation d’une partie, il s’agit ainsi des obligations de résultat et des obligations de moyens.

L’obligation de résultat impose à la partie concernée de réaliser la prestation telle qu’elle l’a promis. Par exemple, le peintre qui doit refaire votre appartement doit y parvenir : il doit refaire les peintures selon les règles de l’art, et selon le choix que vous avez formulé (fini, couleurs…). Autre exemple, un transporteur a généralement une obligation de résultat de transporter un bien ou une personne d’un point A à un point B.

La seule façon pour un de ces prestataires de s’affranchir de ces impératifs est de prouver la cause étrangère : l’immeuble dans lequel se situait votre appartement s’est effondré et il ne peut y être réalisé de travaux ; un glissement de terrain a détruit le pont sur lequel devait passer le train.

Ainsi, dans le cadre d’une obligation de résultat, la partie doit impérativement réaliser la prestation à laquelle elle s’est obligée ; la raison est que cette prestation dépend entièrement d’elle et qu’il n’y a aucune raison, si le prestataire s’engage à faire telle ou telle chose, qu’il n’y parvienne pas s’il y met les moyens nécessaires.

En revanche, l’obligation de moyens impose à la partie concernée de tout mettre en oeuvre pour accomplir sa mission, mais ne lui impose pas d’obtenir un résultat.

Un exemple simple est celui de la prestation d’un architecte. Certes, il a une obligation de résultat dans la partie de sa mission concernant la conception : il doit à son client le Maître d’ouvrage de concevoir un ouvrage réalisable, conforme aux normes et aux règlements applicables. En revanche, une partie de sa mission relève de l’obligation de moyens.

Ainsi, généralement, une partie de la mission de l’architecte consiste à assister le maître d’oeuvre lors de la levée des réserves signalées à la réception de l’ouvrage. Or ces réserves doivent être levées par l’entreprise (qui a pour cela une obligation de résultat, justement) et non par l’architecte.

Dans ce cas, la seule obligation de l’architecte, c’est de tout mettre en oeuvre pour que les entreprises fassent le nécessaire, notamment en les mettant en demeure et en conseillant au Maître d’ouvrage de ne pas payer le solde des travaux avant complète levée des réserves. Si les réserves ne sont pas levées, le Maître d’ouvrage peut tout à fait tenter d’engager la responsabilité de l’architecte. Toutefois, si celui-ci prouve qu’il a pris ces mesures (mise en demeure…) sa responsabilité ne pourra pas être engagée. Le Maître d’ouvrage ne pourra rechercher sa responsabilité que s’il prouve que l’architecte n’a pas mis en oeuvre les moyens nécessaires à la réalisation de son obligation.

Dès lors, il est intéressant de bien avoir en tête la différence entre les obligations de moyen et de résultat pour bien comprendre ce à quoi votre co-contractant s’est obligé à votre égard, et s’il est pertinent, en cas de problème, d’envisager d’engager sa responsabilité.

Responsabilités contractuelle et délictuelle

Responsabilités contractuelle et délictuelle

Il semble qu’un  billet pour permettre de distinguer entre les deux grands régimes de responsabilités contractuelle et délictuelle, en matière de droit civil n’est pas inutile.

Le principe de base est simple : lorsqu’une personne, qu’on va appeler Primus, cause du tort à une autre personne, Secundus, Primus dit indemniser Secundus à raison du dommage qu’il lui a causé.

C’est un grand principe du droit, qui a toute une série d’avantages ; notamment, il permet de régler judiciairement les différends (au lieu d’avoir à sortir la batte de baseball) et il favorise la sécurité juridique.

Ensuite, tout dépend du point de savoir si Primus et Secundus sont liés par un contrat. En effet, la distinction entre les deux grands régimes de responsabilité dépend tout simplement de l’existence, ou non, d’un contrat entre les parties concernées.

En premier lieu, prenons la première hypothèse, la plus simple : il n’y a pas de contrat. Ce sera la responsabilité délictuelle qui s’appliquera. 

Illustrons la par un exemple très simple (et réel) : Primus est en train de réparer son toit. Pour cela il utilise divers outils. A un moment, il pose son marteau, dont il n’a plus besoin momentanément, à côté de lui. Sauf que la zone où il le pose est en pente : le marteau glisse, tombe dans la rue et assomme Secundus en train de passer sur le trottoir.

Secundus est en droit de demander une indemnisation à Primus à raison du préjudice subi (une très grosse bosse s’il a de la chance).

Il s’agit de l’illustration du principe général de responsabilité délictuelle édicté à l’article 1382 du Code Civil, à savoir que : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

Engager la responsabilité de Primus sur ce fondement demande que trois conditions soient remplies : qu’il ait commis une faute, qu’un préjudice soit subi, et qu’il existe un lien de causalité entre les deux.

Dans mon exemple, les trois conditions sont réunies : Primus a commis une faute (ou à tout le moins une négligence) en posant son marteau sur une surface inclinée sans le sécuriser, Secundus a subi un préjudice (la bosse) et c’est bien la chute du marteau qui est à l’origine de ce préjudice.

Dès lors, incontestablement, Primus (ou son assureur…) soit indemniser Secundus.

 En second lieu, voyons le cas où il existe un contrat entre Primus et Secundus. Ce sera la responsabilité contractuelle qui s’appliquera. 

Dans ce cas, la responsabilité de chacun se définit par rapport aux obligations contractuelles de l’un envers l’autre. Prenons un autre exemple très simple : Primus est propriétaire d’un appartement, et Secundus est peintre. Les deux parties conviennent que Secundus va refaire les peintures à neuf.

L’obligation de Secundus est donc de refaire les peintures dans le respect des règles de l’art (autrement dit, faire des travaux de qualité) et selon ce qui a été convenu dans le contrat (peindre tout en bleu, comme convenu, et non en noir).

L’obligation de Primus est tout simplement de payer Secundus.

Dans ce cadre, la responsabilité de l’un ou de l’autre peut être engagée s’il ne remplit pas ses obligations : pour Secundus, ce serait le cas où il fait des travaux de mauvaise qualité, ou ne peint pas la bonne couleur ; pour Primus, ce serait le fait de ne pas payer son prestataire.

En définitive, ici, la faute contractuelle est constituée par le fait de ne pas remplir l’obligation que l’on a acceptée. Pour engager la responsabilité de l’autre partie, il faut donc prouver deux éléments : tout d’abord que l’adversaire s’était engagé à telle obligation, et ensuite qu’il ne l’a pas remplie.

Dans ce cas, l’inexécution d’obligation que l’on reproche à la partie adverse se résoudra en dommages et intérêts, selon les termes de l’article 1147 du Code Civil, selon lequel « Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part ».

Dès lors, sauf à ce que celui qui n’a pas rempli son obligation démontre que c’est à raison d’une force majeure, il sera condamné à indemniser son co-contractant.

© 2024 Marie Laure Fouché

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