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Catégorie : Propriété Intellectuelle (Page 2 of 2)

Nouveaux supports pour la redevance pour copie privée

Afin de compenser la faculté qu’a toute personne d’effectuer une copie privée d’une oeuvre, il existe un système consistant à surtaxer les supports sur lesquels cette copie peut être effectuée.

Par exemple, les DVD vierges voient leur prix augmenté d’une redevance spécifique.

Or, à partir de maintenant, trois nouveaux supports verront leur prix concerné par cette redevance : les cartes mémoires, les disques durs externes et les clés usb.

C’est une solution logique. Autrefois, l’heureux propriétaire qui voulait écouter son vynile à la maison et à la campagne devait acheter deux disques. Aujourd’hui, notre quidam n’a qu’à faire une copie – ou deux, ou trois, ou quatre, ou… bref, vous m’avez comprise.

Par conséquent, il est normal que l’auteur soit indemnisé du fait qu’on achète moins d’exemplaires de son oeuvre. Il est ainsi relativement logique que les supports sur lesquels on peut aisément copier des fichiers soient soumis à la redevance.

C’est cependant une solution qu’on peut regretter vu que les produits en question vont voir leur prix augmenter.

En outre, on pourrait objecter de façon tout à fait valable que ces périphériques peuvent être utilisés à but strictement professionnel, ou à tout le moins ne comporter aucune copie d’oeuvre protégée. C’est probablement pour cette raison que les disques dur internes aux ordinateurs ne sont pas (encore ?) taxés : leur vocation première est de faire fonctionner l’ordinateur et d’abriter les données de l’utilisateur – pas de servir de base de stockage d’oeuvres.

Contrefaçon : parce qu’Ebay le vaut bien

Il semblerait aux dernières nouvelles que l’Oréal ait décidé de poursuivre le géant des enchères en ligne au motif que son site proposerait à la vente des contrefaçons de parfums (source : Libération).

Ce litige est particulièrement intéressant dans la mesure où on pourrait supposer que Ebay n’est pas responsable de ce que ses utilisateurs mettent en vente des produits contrefaits.

Le code de propriété intellectuelle précise en effet qu’est puni de trois ans d’emprisonnement et de 300.000 Euros d’amende le fait pour toute personne (…) d’offrir à la vente ou de vendre des marchandises présentées sous une marque contrefaite.

Le premier réflexe de la société Ebay, en toute logique, sera de dire qu’elle se borne à mettre à disposition un service d’intermédiaire et qu’elle n’est aucunement responsable des objets mis en vente.

Sur ce point, l’Oréal pourrait aisément répondre qu’Ebay perçoit une commission sur chacun des objets vendus, de sorte qu’elle profite du produit de la contrefaçon, et qu’en outre elle ne met en place aucun système fiable permettant d’éviter la contrefaçon.

Il sera ainsi intéressant – si le procès a bien lieu et que le litige ne se résout pas à l’amiable – de voir si les tribunaux français décident qu’une société hébergeant un service de vente, mais sans pour autant vendre ou offrir à la vente elle-même les produits, peut être déclarée contrefactrice.

L’origine illicite de l’oeuvre copiée fait obstacle à l’exception de copie privée

L'origine illicite de l'oeuvre copiée fait obstacle à l'exception de copie privéeEn matière de copie privée, un argument souvent avancé par les téléchargeurs acharnés est qu’ils ont tout à fait le droit de copier des œuvres pour leur usage personnel.

En effet, en la matière, il faut distinguer le fait de télécharger des fichiers, c’est-à-dire d’en obtenir copie, et celui de diffuser ces fichiers à d’autres internautes.

La plupart des logiciels de peer to peer fonctionnent sur un principe d’échange, de sorte qu’il est impossible de télécharger sans diffuser ce qu’on obtient.

Toutefois, certains ont pu avancer l’argument que si l’on télécharge sans diffuser, l’opération est licite car elle rentre dans l’exception de copie privée.

En effet, l’article L 122-5 du Code de Propriété Intellectuelle précise que lorsque l’œuvre a été divulguée au public, son auteur ne peut interdire les copies strictement réservées à l’usage privé du copiste.

Cet article ne distingue pas selon que l’exemplaire copié a une origine licite (par exemple, CD acheté dans le commerce) ou illicite (par exemple, fichier qui provient déjà d’un téléchargement).

En conséquence, l’internaute qui télécharge des fichiers, même issus d’une copie non autorisée, et ce sans les partager avec d’autres prétendait qu’il ne faisait rien de mal, et se contentait de profiter de l’exception de copie privée.

La question s’était déjà posée à plusieurs reprises devant les tribunaux.

La Cour d’Appel de VERSAILLES a donné son avis sur la question le 16 mars 2007 (jurisdata 2007-331563). L’affaire était banale : un internaute avait téléchargé des milliers de fichiers musicaux par un logiciel de peer to peer.

Une fois devant les juges, notre internaute avait précisément développé l’argumentation expliquée plus haut, et selon laquelle peu importait que la source de sa propre copie soit licite ou pas.

La Cour d’Appel répond, de façon laconique, que :

« Il est établi que les œuvres reproduites et diffusées l’ont été à partir de sources non autorisées par leurs auteurs respectifs et sans qu’aucun droit ne soit versé à ces derniers. Dès lors, l’exception de copie privée tirée de l’article L 122-5 [du Code de Propriété Intellectuelle] ne peut être valablement invoquée par le prévenu ».

Ce qui revient à dire qu’on ne peut réaliser une copie privée que si l’œuvre copiée a une origine licite.

Autrement dit, si vous achetez un CD, un film, etc…, vous avez la faculté d’en faire une copie. Attention cependant, cette possibilité n’est pas un droit acquis, comme l’a rappelé la Cour de Cassation dans l’affaire Mulholland Drive.

Mais une fois que vous avez fait cette copie… Vous n’avez pas le droit de la diffuser au public en l’offrant au téléchargement : il s’agit en effet d’une représentation que seul l’auteur peut autoriser.

Mais à supposer que vous le fassiez quand même, la personne qui télécharge le fichier est elle aussi dans l’illégalité, car l’origine de ce fichier téléchargé est illicite.

Il serait intéressant de savoir si le prêt de l’œuvre, de l’œuvre originale, s’entent, pas d’une copie, par exemple par un ami ou par une bibliothèque, est considéré comme une origine licite. J’aurais tendance à penser que oui, mais je ne crois pas qu’il y ait de la jurisprudence en la matière.

Maintenant, il reste à voir si la Cour de Cassation donnera son avis sur la question, ce qui aurait pour effet de la trancher de façon plus précise.

Edit: A présent, la question ne se pose plus. En effet, l’article L 122-5 du Code de la Propriété Intellectuelle, qui prévoit l’exception de copie privée, exige que celle-ci soit réalisée « à partir d’une source licite ». Autrement dit, fini de pouvoir invoquer l’exception de copie privée quand on télécharge une oeuvre piratée.

Noms de villes, marques et noms de domaines

Noms de villes, marques et noms de domainesEn matière de propriété industrielle, il est interdit de déposer une marque qui porterait atteinte au nom, à l’image ou à la renommée d’une collectivité territoriale. Cette règle est édictée par l’article L711-4 du Code de Propriété Intellectuelle.

En effet, le législateur a considéré que les villes autres collectivités territoriales, à l’instar des personnes privées, ont un nom, une réputation, qu’il convient de protéger. Dans ce cas de figure, la collectivité qui veut empêcher l’enregistrement de la marque doit prouver qu’elle subit un préjudice. Une ville réputée pour ses produits de luxe pourrait ainsi faire obstacle à l’enregistrement d’une marque reprenant son nom pour des produits contraires à son image de marque.

Mais il n’est toujours pas nécessaire que la collectivité prouve l’existence de ce préjudice. En effet, le Code de Propriété Intellectuelle prévoit par ailleurs (article L711-3) que nulle marque ne peut être enregistrée qui serait de nature à tromper le public, notamment sur la provenance géographique d’un produit ou service. Dès lors, point n’est besoin que la collectivité ait subi un préjudice, il suffit qu’elle prouve que la marque risque d’entraîner une confusion dans l’esprit du public.

C’est ainsi que dans une décision récente (Tribunal de Grande Instance de Paris, 6 juillet 2007, 3ème chambre 2ème section), le Tribunal a déclaré nulle la marque « paris-sansfil.org », en raison du risque de confusion qui pouvait se produire dans l’esprit du public entre la marque et la ville de Paris, au motif que cette dernière intervient activement dans le domaine des nouvelles technologies, alors que la marque litigieuse émane d’une association sans rapport aucun avec la ville de Paris.

C’est pour les mêmes raisons (bien que sur le fondement juridique différent de la responsabilité délictuelle) que le Tribunal a ordonné à l’association en cause de modifier ses noms de domaine comportant les termes « Paris-sansfil », de même que sa dénomination sociale.

Ainsi, il convient d’être vigilant dans le choix d’une marque ou d’un nom de domaine qui reprendrait un nom géographique. En effet, il y a fort à parier que la collectivité territoriale concernée n’apprécie pas qu’un tiers s’approprie – même en toute bonne foi – son nom et la réputation qui peut y être attachée.

Dans le doute, il est préférable de consulter un spécialiste qui donnera toutes précisions utiles et évaluera le niveau de risque d’une telle démarche.

Artistes et graphistes, protégez vos créations

Dans le long cursus en forme de parcours du combattant qui attend celui qui veut faire ses études puis carrière dans les arts graphiques, il n’est guère consacré de temps à une petite formation sur les droits dont bénéficient les artistes.

Comme tout auteur, le graphiste qui réalise un travail d’illustration, de création d’une identité visuelle ou d’une charge graphique bénéficie du droit d’auteur pour protéger sa création.

Schématiquement, le droit d’auteur permet de protéger les droits patrimoniaux et les droits moraux de l’auteur.

Les droits patrimoniaux sont constitués par le droit de reproduction et le droit de représentation. Cela signifie que personne ne peut copier la création ou faire une exposition sans l’accord exprès du graphiste. Ces droits peuvent être cédés, moyennant rémunération.

Les droits moraux sont constitués du droit à la divulgation, du droit au retrait et au repentir, du droit au respect et du droit au nom. Autrement dit, seul l’auteur décide s’il veut divulguer sa création au public, personne ne peut l’y obliger. De façon similaire, l’auteur a le droit, après avoir divulgué une œuvre, de décider que celle-ci doit cesser d’être vue. Il peut ainsi refuser a posteriori que son œuvre soit accessible au public, ou modifier celle-ci. Le corollaire est que personne n’a le droit de modifier l’œuvre de l’auteur : c’est le droit au respect. Enfin, tout auteur a le droit que son œuvre soit connue comme étant sienne, c’est-à-dire que sa paternité sur cette dernière soit reconnue.

Les droits moraux ne peuvent jamais être cédés et demeurent attachés à la personne de l’auteur.

La chose se complique lorsque, comme c’est très souvent le cas, un créateur travaille pour un client qui lui commande un logo, une charte graphique, un design pour un site internet…

Dès lors, pour que le rapport contractuel fonctionne, il est nécessaire que l’auteur cède ses droits patrimoniaux – ou certains d’entre eux seulement – à son client. En effet, la cession d’un droit d’auteur ne se présume pas et l’auteur a tout intérêt à indiquer précisément, au sein des droits patrimoniaux, ce qu’il cède.

Il est conseillé pour cela, dans l’idéal, de conclure un contrat pour chaque commande. La meilleure solution consiste, lorsque tous les clients sollicitent une prestation similaire, à se faire rédiger par un professionnel un modèle de contrat simple, qu’il suffit de compléter. Dès lors, les obligations de tous étant clairement définies, le créateur est convenablement protégé.

A défaut il doit impérativement faire signer le devis qu’il propose. Cela ne remplace pas un contrat en bonne et due forme, mais présente l’avantage de prouver l’accord qui existe entre le créateur et son client, et permet ainsi de régler les situations délicates dans lesquelles le client de mauvaise foi refuse de payer la facture finale (en effet, cela permet de faire un référé provision avec de bonnes chances de succès).

Ainsi, il est sage, tant dans un contrat, qu’au bas d’un devis (et éventuellement pas le biais de conditions générales imprimées systématiquement avec chaque devis), de préciser exactement les droits cédés. En effet, il est aussi important pour le client d’avoir le droit d’utiliser la création qu’il a payée que pour le créateur de savoir précisément ce qu’il cède.

Dans une telle optique, il est judicieux de préciser l’usage qui sera fait de la création (droit au respect). Par exemple, dans le cas d’une illustration, il convient de préciser qu’elle ne figurera que dans tel livre, ce qui évite par exemple qu’elle ne serve à une campagne de publicité.

Le problème, pour le client, est que quoi qu’il arrive, il ne pourra jamais acquérir l’intégralité des droits de l’œuvre, les droits moraux restant acquis à l’auteur.

Sur ce point, une précision s’impose. Certes, l’auteur conserve le droit de modifier ou retirer sa création, même si on imagine mal qu’un graphiste souhaite ainsi mettre à néant son propre travail. Mais s’il le fait, il s’expose à ce que son client, qui souvent a construit toute son image de marque sur la création de l’artiste, sollicite des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la perte de son identité. Il convient donc d’envisager avec prudence toute décision qui pourrait être ensuite lourde de conséquence.

Enfin, tout créateur doit penser à se munir contre le risque de plagiat. Or, en droit d’auteur, c’est celui qui crée en premier qui détient le droit.

Donc, si vous créez quelque chose à quoi vous tenez particulièrement, ou si votre client vous semple un peu douteux, je recommande vivement un passage à l’INPI (Institut de la propriété Intellectuelle) où pour environ 10 Euros, vous pourrez au moyen d’une « Enveloppe Soleau » donner date certaine à vos créations.

Bref retour sur l’affaire Mulholland Drive

Vous souvenez vous de cette affaire qui avait fait grand bruit en son temps ? Un consommateur avait acheté le DVD du film de David Lynch et souhaité en faire une copie à usage strictement privé. Las, les systèmes de blocages intégrés dans le DVD le lui interdisaient.

La cour d’appel avait décidé en avril 2005 que l’exception de copie privée permettait au détenteur dudit DVD de faire des copies de l’oeuvre à son usage personnel, et que réaliser ces copies ne portait pas atteinte aux droits d’auteur sur l’oeuvre.

En effet, la possibilité de réaliser ces copies privées ne portait pas « atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre ». Autrement dit, le droit de faire cette ou ces copies ne causait pas de préjudice au titulaire des droits d’auteur.

Elle en avait conclu que l’éditeur du DVD n’avait pas le droit de farcir celui-ci de mesures techniques empêchant la copie, ou la limitant, puisque la loi ne le prévoyait pas.

Par arrêt du 28 février 2006, la Cour de Cassation avait décidé le contraire, et estimé que « l’atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre » « s’apprécie au regard des risques inhérents au nouvel environnement numérique quant à la sauvegarde des droits d’auteur et de l’importance économique que l’exploitation de l’oeuvre, sous forme de DVD, représente pour l’amortissement des coûts de production cinématographique ».

En d’autres termes, comme aujourd’hui on peut copier ce qu’on veut comme on veut, l’exception de copie privée, dans un environnement numérique, portait atteinte aux droits d’auteur. Les auteurs de cet arrêt pensaient manifestement au peer to peer.

Et la cour de Cassation d’en conclure que le distributeur d’un DVD peut très bien prévoir des dispositifs techniques limitant la copie.

Comme il s’agissait d’un arrêt de cassation, l’affaire a été jugée de nouveau par une Cour d’Appel, qui, de façon assez prévisible, a décidé le 4 avril 2007 que si le consommateur doit être en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien qu’il acquiert, en revanche, l’absence de mention l’informant qu’il ne peut réaliser de copie privée ne constitue justement pas une caractéristique essentielle du produit.

Ainsi, alors même que des sociétés comme Apple favorisent la disparition des DRM (Digital Rights Management), notamment en proposant à la vente des morceaux de musique qui en sont dépourvus, on constate que le droit français se dirige dans une direction radicalement opposée. Désormais, il reste à voir si cela est vraiment de nature à protéger le droit des auteurs.

Marque et nom patronymique : Le cas Inès de la Fressange

En matière de marque, le nom patronymique bénéficie d’un statut particulier.

Tout d’abord, il n’est pas possible de déposer une marque qui porterait atteinte à un droit antérieur constitué d’un nom patronymique. Par exemple, il est fortement déconseillé de déposer une marque de chocolats et confiseries « Nicolas Sarkozy ».

Ensuite, même titulaire d’une marque enregistrée de façon parfaitement régulière, vous ne pouvez empêcher une personne d’employer de bonne foi comme nom commercial, enseigne, dénomination sociale, et ce depuis une période antérieure à votre dépôt de marque, son nom patronymique, identique à cette dernière.

Ainsi, le nom de la personne est protégé de façon à éviter que le tiers qui n’a rien demandé à personne ne se trouve dans l’impossibilité d’utiliser commercialement son patronyme.

Il en va différemment de celui qui, sciemment dépose son propre nom à titre de marque. A partir de ce moment, cette marque patronymique peut être cédée à un tiers comme n’importe quelle autre marque, de sorte que celui qui porte le nom ne peut plus l’utiliser sans porter atteinte aux droits de l’acquéreur.

Cette dernière règle, clairement établie depuis 1985 à l’occasion de l’affaire « Bordas », a semblé être remise en question à l’occasion de l’affaire concernant Inès de la Fressange.

En effet, suite à un conflit avec sa société le célèbre mannequin devenu styliste s’est vu empêché d’utiliser son nom pour désigner ses créations.

Que s’est-il passé ? Inès de la Fressange avait dans un premier temps vendu à une société, dont elle était devenue Directeur Artistique, diverses marques portant son nom. Sauf qu’en 1999, la société en question l’a licenciée, tout en prétendant garder la propriété des marques, ce dont elle avait parfaitement le droit, conformément à la jurisprudence Bordas.

Inès de la Fressange ne l’a toutefois pas entendu de cette oreille et a porté l’affaire devant les tribunaux.

Son avocat a alors eu l’astuce de faire appel à l’article L 714-6 du Code de Propriété Intellectuelle, quasiment jamais utilisé, et selon lequel « Encourt la déchéance de ses droits le propriétaire d’une marque devenue de son fait (…) propre à induire en erreur, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou du service ».

Concrètement, cela signifie que le titulaire d’une marque perd cette dernière s’il l’a laissée devenir trompeuse pour le consommateur. Cela peut concerner par exemple une marque indiquant clairement une provenance géographique, alors qu’entre temps, le produit est devenu made in Taïwan. Le consommateur, croyant que le produit vient d’un endroit particulier, est induit en erreur.

L’argumentation d’Inès de la Fressange revenait ainsi à dire que comme elle n’était plus à l’origine de la création des produits vendus sous son nom, le public, qui croyait le contraire, était trompé, et que la marque devait être déchue.

Cette argumentation a emporté la conviction de la Cour d’Appel, qui a effectivement prononcé la déchéance de la marque (Paris, 15 décembre 2004, Ch. 4, Sec. A, jurisdata 2004-258939).

En revanche, la Cour de Cassation, saisie de l’affaire par la société titulaire de la marque, a décidé pour sa part qu’Inès de la Fressange était irrecevable à demander la déchéance de cette dernière (cette irrecevabilité signifiant que ses arguments relatifs à la tromperie n’ont même pas été examinés).

La Cour a en effet décidé (Chambre Commerciale, 31 janvier 2006, affaire n°05-10116) qu’Inès de la Fressange ne pouvait intenter contre la société à laquelle elle avait vendue sa marque une action tendant à son éviction, autrement dit ayant pour but de lui faire perdre les droits sur la marque. En effet, le vendeur d’une chose doit garantir à son acquéreur qu’il ne tentera pas de le déposséder.

La Cour de Cassation a ainsi émis une décision d’ordre général, sans même indiquer si oui ou non, la marque était devenue trompeuse. Dès lors, Inès de la Fressange ne peut toujours pas utiliser son nom pour commercialiser des produits.

Cela signifie que celui qui veut exploiter des produits sous son propre nom a tout intérêt à se montrer prudent.

S’il débute une exploitation sous son nom, il devrait effectuer une recherche d’antériorité afin de vérifier que ce nom n’est pas déposé à titre de marque pour des produits et services identique à ceux qu’il se propose d’offrir.

Cela est vrai si le nom a vocation à être utilisé à titre informel (dénomination de société, enseigne…), mais encore plus si le nom a vocation à être déposé à titre de marque. Il existe en effet un risque non négligeable qu’une personne bénéficiant de droits antérieurs s’oppose à l’enregistrement de cette nouvelle marque si les deux sont similaires.

Enfin, lorsque cette même personne dépose son nom en qualité de marque, elle doit mûrement peser toute cession postérieure de la marque. En effet, une fois vendue, son nom devient inutilisable commercialement.

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