Aujourd’hui j’ai eu envie de vous parler d’un contrat qu’on ne rencontre pas souvent, le prêt à usage, que l’on appelle aussi (mais plus rarement, je le concède), de façon délicieusement rétro, « commodat ».
La raison de ce billet, consacré à ce contrat plutôt discret, c’est que peut être, tel un Monsieur Jourdain moderne, vous avez conclu un commodat sans le savoir. C’est presque forcément le cas : on vous a bien prêté un nour un appareil à raclette pour une soirée, ou camion pour déménager, etc…
Il peut donc être utile de savoir comment fonctionne un prêt à usage.
Selon le Code Civil, le prêt à usage est « un contrat par lequel l’une des parties livre une chose à l’autre pour s’en servir, à la charge par le preneur de la rendre après s’en être servi ».
Il s’agit d’un contrat gratuit qui peut porter sur tout ce qui « est dans le commerce », c’est-à-dire sur toute chose que l’on peut légalement louer ou vendre. Il peut s’agir d’un meuble (objet, voiture, etc…) voire même d’un immeuble. Par exemple, vous pouvez prêter un logement afin que quelqu’un y habite.
Il faut savoir en outre que le prêt se transmet aux héritiers, tant du prêteur que de l’emprunteur, sauf à ce que le prêt n’ait été consenti qu’en considération de la personne de l’emprunteur, auquel cas, le prêt finit avec le décès de ce dernier.
Chaque partie au prêt a des obligations à respecter.
Ainsi, l’emprunteur doit garder la chose en bon état et ne l’utiliser qu’à l’usage pour lequel elle lui a été prêtée. Si on vous prête un camion pour déménager votre logement, vous ne pouvez pas l’utiliser pour votre usage professionnel, par exemple.
Les frais exposés pour la conservation de la chose restent à la charge de l’emprunteur, ce qui est logique puisqu’il bénéficie déjà de la chose à titre gratuit.
En revanche, si l’emprunteur a dû exposer une dépense anormale, indispensable à la conservation du bien, et si urgente qu’il n’a pas pu avertir le prêteur préalablement, celui-ci doit le rembourser de la dépense. Il peut s’agir par exemple du cas d’une maison prêtée, et qui un beau jour, menace soudainement de s’effondrer, à tel point qu’il faut poser des étais le jour même. Le prêteur devra alors rembourser les frais d’étayage.
Une fois la durée du prêt terminée, l’emprunteur doit rendre la chose au prêteur.
De son côté, ce dernier ne peut exiger la restitution du bien avant l’expiration de la durée du prêt.
Observons toutefois que si le prêt a été convenu sans condition de durée, le prêteur ne peut demander restitution qu’une fois que la chose a servi pour l’usage pour lequel elle a été empruntée.
Ainsi, si vous prêtez votre camion pour que votre meilleur ami déménage, vous ne pouvez demander restitution qu’après le déménagement. (J’ai toutefois tendance à penser que si finalement le déménagement n’a pas lieu, l’emprunteur doit restituer la chose dès que la date initialement prévue est passée, sauf à ce que le déménagement soit simplement repoussé à une date raisonnablement proche).
Enfin, soulignons que si un prêt a été consenti sans condition de délai, le prêteur peut mettre fin au prêt à tout moment, pour peu qu’il respecte un préavis raisonnable.
Cette règle, d’origine jurisprudentielle, est toutefois parfaitement logique, et cohérente avec l’interdiction des contrats perpétuels. Ainsi, tout contrat conclu sans condition de durée peut être résilié par n’importe quelle partie, sous réserve d’un préavis d’une durée raisonnable.
Seul problème à considérer : si vous consentez/bénéficiez d’un prêt sur une chose d’une certaine valeur, il est conseillé d’en conserver la preuve, par exemple par un écrit signé des deux parties (ou à tout le moins du prêteur) afin d’éviter les ennuis, par exemple avec les héritiers du prêteur, pas forcément ravis de voir qu’une partie du patrimoine dont ils héritent est intouchable car prêtée.
bonjour,
mon bailleur m’a prêté une clé pour que je puisse ouvrir ma porte et prendre la mienne qui était à l’intérieur. Il m’ a fait signé un papier qui stipulait que la clé m’avait bien été prêtée.
Après avoir pu récupéré ma clé (dans la journée) je lui ai directement rendue. je pensais qu’il avait jeté le papier concernant le prêt mais ce ne fut pas le cas.
Aujourd’hui, il me réclame la restitution de la clé .
il n’est pas en mesure de confirmer qu’il lui manque une clé (il ne connait pas combien il en a) et le papier que j’ai signé ne stipule pas que je ne lui ai pas rendu ou que je devais prouver la restitution de la clé.
voici le papier signé :
« reçu le 7/11/ 2018, la clé du communautaire de la chambre B7 3e étage » suivi de ma signature.
Comment puis-je m’en sortir ?
merci beaucoup
Bonjour,
Compromis de vente prévu pour la semaine prochaine pour notre maison secondaire. Les acheteurs souhaitent un pret d’usage commodat pour avoir les clés, faire des travaux dans la maison en prévision de l’achat définitif, mettre l’EDF et le gaz a leur nom. J’ai peur pour les responsabilités en cas d’incendie, accident, fuites, destruction, vol…
Nous aurons encore toutes nos affaires à l’intérieur. Je ne veux pas qu’ils s’installent.
Cette procédure est-elle cadrée ? Pouvons-nous refuser ?
Bonjour Maitre,
Cette approche est une bonne option pour des concubins, concernant l’usage de la résidence principale. Je comprends sans problème de laisser l’usage gratuit. Mais quand est il concernant les charges ? charges de copro , Assurance, EDF Eau etc ? Je ne suis pas sur que cela soit supportable pour mes héritiers de payer des charges d’un logement habité par ma concubine !
Quel est votre feedback
Cordialement
Bonjour
Dans le contexte d’un Commodat ou contrat de prêt à usage: peut-on écrire
– sera à la charge du Preneur ces factures de consommation d’énergie (gaz/électricité et eau).
ou est ce que cela est considérer comme étant hors contexte ? (ne pouvant plus dans ce cas être un prêt à usage car les facture sont à la charge du Preneur ?)
Je vous remercie de votre attention
Cordialement
Houlà, aucune idée. Je vous conseille de poser la question au notaire qui gèrerait votre achat, c’est un spécialiste en matière patrimoniale.
Mon compagnon et moi souhaitons acheter un bien immobilier ensemble mais ne souhaitons pas nous marier. Nous cherchons une solution juridique en cas de décès de mon conjoint, pour que je puisse continuer à habiter le bien immobilier sans avoir à verser immédiatement la part à son fils héritier (ce qui me forcerait à vendre).
Ainsi ma question est la suivante : si nous achetons un bien immobilier 2/3 pour moi, et 1/3 pour mon compagnon, si celui-ci venait à décéder un prêt à usage qu il aurait signé à mon bénéfice « à vie durant » me permet il de rester dans le logement sans que son héritier puisse demander le versement de sa part ?
Merci de votre aide
Bonjour, dans le cas d’un prêt à usage dont je suis bénéficiaire, puis je partir avant le délai de préavis de 6 mois signé sur le contrat ?
Merci
Maître,
Peut-on mettre les TF, charges locatives au débit de l’emprunteur dans le cadre d’un commodat?
A mon avis, non. Il y a un terme qui a été déterminé, et le décès du prêteur n’y change pas grand chose. Il faudrait vérifier la jurisprudence actuelle mais le code civil est assez clair sur la question.
Bonjour, nous venons d’hériter d une maison sur laquelle est signé un prêt à usage jusqu au décès de l emprunteur. Ce contrat a donc été signé par la personne décédée et l emprunter mais nous, nous nov avons absolument rien signé. On nous a imposé cette situation.Est-il possible de stopper ce prêt à usage?
Bonjour,
Dans le cas d’un commodat à durée déterminée, est-il possible pour l’emprunteur de résilier le commodat avant la fin de la durée, et sous quelles conditions ? Savez-vous quelles informations doivent apparaître dans la lettre de renonciation au commodat ?
Merci par avance
Vous devriez consulter un avocat spécialisé en droit rural…
Bonjour,
Peut-on considérer qu’un préavis de trois mois est un délai raisonnable par rapport à une année culturale ?
Je suis propriétaire d’une maison d’habitation entourée de terres agricoles (2.3 ha), lesquelles sont mises à disposition gratuitement à un agriculteur.
Aujourd’hui j’ai signé un sous seing privé pour vendre cette maison avec les terres qui l’entourent. Dans les clauses suspensives, il figure le fait que l’agriculteur doit libérer les terres avant le 31/10/15.
Or l’agriculteur fait le mort, ne répond ni au téléphone, ni aux mails, ni aux courriers de mon notaire…
J’envisage de lui adresser un courrier par voie d’huissier lui demandant de libérer ces terres dans un délai de 3 mois (soit avant le 31/10/15)
Qu’en pensez vous ?
En vous remerciant.
Bien cordialement.
Je ne crois pas que le code civil prévoie cette éventualité (il prévoit celle où le prêteur décède et où les héritiers sont tenus). J’ai tendance à penser que l’acquéreur d’un bien grevé d’un prêt ne peut avoir plus de droits que celui qui lui vent, le prêteur, si ce dernier s’est engagé à attendre la mort de l’emprunteur…
Bonjour,
Savez-vous si un prêt à usage à terme défini (mort de l’emprunteur) peut être opposé à l’acquéreur du bien immobilier grevé du prêt à usage en question ?
Merci.
Il faut voir les conditions du prêt, puisqu’un contrat perpétuel est interdit. Y avait-il un terme ? Ou non? … L’examen du détail du dossier est nécessaire pour voir ce qu’il en est. Vous pouvez me contacter si vous souhaitez.
Bonjour,
Si dans le cadre d’une liquidation judiciaire, une personne a acquis via une vente forcée organisée par le tribunal du commerce un bien immobilier grevé d’un prêt à usage, existe t’il un recours pour contester la légalité de ce prêt qui empêche le nouvel acquéreur de profiter de son bien ? En d’autres termes, est ce envisageable de contester ce prêt sachant que le jour de sa conclusion le prêteur avait pleinement conscience que ce bien ne lui appartiendrait plus bien avant l’échéance de ce prêt?
Merci de votre réponse d’une grande importance
Absolument.
La Cour de cassation a d’abord considéré que le
propriétaire ne pouvait unilatéralement résilier le
contrat que s’il avait un besoin urgent et imprévu
de l’immeuble mis à disposition ou si le besoin
qu’en avait l’occupant avait cessé. Puis elle a
estimé qu’en l’absence de durée convenue entre
les parties pour le prêt et en l’absence de besoin
urgent et imprévu du propriétaire, il appartenait
au juge d’assigner au contrat un terme
raisonnable.
Dernièrement la Cour de cassation a évolué
en reconnaissant au prêteur le droit de mettre
fin au prêt à tout moment, en respectant un
délai de préavis raisonnable, lorsque aucun
terme n’a été convenu pour le prêt d’une
chose d’un usage permanent et sans
qu’aucun terme naturel ne soit prévisible,
étant entendu que l’obligation pour le preneur de
rendre la chose prêtée après s’en être servi est
l’essence même du commodat.
Cette dernière solution a été adoptée par la
première chambre civile de la Cour de cassation,
comme par la troisième chambre.Il s’agit d’un retour pur et simple au droit
commun de la résiliation des contrats à durée
indéterminée qui permet à tout contractant de
résilier le contrat unilatéralement et à tout
moment.