Avocat en construction et copropriété

Étiquette : tribunal de grande instance

Contestation d’AG de copropriété: délai impératif de deux mois

Comme je l’ai exposé dans plusieurs articles, le délai de contestation en Assemblée Générale de copropriété est de deux mois.

Plus précisément, il est de deux mois à compter de la notification du Procès-Verbal d’Assemblée Générale par le syndic.

Cela résulte de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965:

« Les actions en contestation des décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d’assemblée. Cette notification est réalisée par le syndic dans le délai d’un mois à compter de la tenue de l’assemblée générale ».

Il faut tout particulièrement veiller à respecter ce délai.

En effet, faute de contestation dans les deux mois de la notification, celle-ci sera considérée comme irrecevable car tardive.

Lorsque vous souhaitez procéder à une contestation d’Assemblée Générale, en conséquence, je conseille très vivement de faire très attention à la notification du Procès-Verbal, qu’elle intervienne par voie électronique ou par courrier recommandé.

Le point de départ du délai de contestation est la date de la première présentation par la Poste, donc, faites attention.

Ainsi, la date de première présentation (et non la date à laquelle vous avez effectivement reçu le recommandé) est le 5 mars, votre assignation en contestation d’Assemblée Générale, devant le Tribunal de Grande Instance compétent, doit intervenir au plus tard le 5 mai suivant.

Inutile de préciser que si vous voulez faire cette contestation, il est très, très vivement conseillé d’aller voir un avocat sans tarder, et pas au dernier moment.

En effet, il faut que votre avocat (obligatoire dans ce type de procédure) ait le temps de rédiger l’assignation, de vous la soumettre pour avis puis de la faire signifier à la partie adverse, de préférence avant le 5 mai afin d’éviter toute difficulté de dernière minute.

Le respect de ce délai est donc important, car une fois dépassés les deux mois, aucune contestation d’Assemblée Générale n’est plus recevable.

Et ce, quand bien même les résolutions votées lors de cette Assemblée Générale seraient lourdement illégales.

Cette règle, associée à un délai de contestation très court, a de toute évidence pour objet d’éviter que les résolutions d’Assemblée Générale ne puissent être en suspens sur de longues périodes.

Mais le corollaire est que si une décision d’Assemblée Générale est problématique, voire illégale, si elle n’est pas contestée dans le délai, elle devient définitive.

Il faut donc être particulièrement vigilant concernant ce délai.

Petit guide pour se défendre seul à son audience

D’une façon générale, je ne conseille pas du tout de se défendre seul à son audience.

Ce n’est pas un réflexe corporatiste, c’est simplement que moi, avocat, j’aime bien avoir un particulier, non défendu par un avocat, face à moi. C’est généralement plus facile.

En effet, un particulier n’aura, généralement, pas les connaissances de droit, mais aussi de procédure, lui permettant d’avoir toutes ses chances.

Se faire assister d’un avocat vous aide donc à avoir les meilleures chances possibles de gagner votre affaire.

Peut-on toujours se défendre seul ?

Aller seul à son audience, ce n’est pas toujours possible. Vous pouvez le faire devant le Tribunal d’Instance, ou devant le Tribunal de Commerce, ou encore au Conseil des Prud’hommes (pour rester en matière civile).

Mais par exemple c’est impossible devant le Tribunal de Grande Instance, où la représentation par avocat est obligatoire.

Ainsi l’article 751 du Code de Procédure Civile dispose que:

« Les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat ».

Donc au Tribunal de Grande Instance, pas question de se défendre seul, on est obligé de prendre un avocat (sauf pour un référé, là c’est bon).

Ceci étant, vous pouvez décider de vous défendre seul, soit par principe, soit parce que l’affaire n’a pas l’air bien grave, soit encore par ce que vous ne pouvez pas vous offrir l’assistance d’un avocat.

Dès lors, que faire quand on décide de se défendre seul au tribunal?

Il faut rappeler que le juge est là, en principe, pour appliquer la bonne règle de droit aux faits qui lui sont présentés. C’est la « qualification ».

Donc, en principe du moins, si vous expliquez clairement les faits, le juge appliquera le droit.

Vous n’avez donc pas absolument besoin de lui exposer la règle de droit. C’est mieux, soyons clairs, mais au pire, on peut s’en passer.

Donc voici quelques conseils pour préparer son dossier en vue de son audience.

Que faire pour préparer son audience

D’abord, prévoyez votre carte d’identité sur vous. En effet le juge voudra vérifier que vous êtes bien qui vous dites.

Si vous allez au Tribunal pour votre société (dont vous êtes le dirigeant), amenez un Kbis récent.

Ensuite, même si l’affaire est simple, il est préférable de rédiger votre argumentation par écrit.

Je ne conseille pas de forme spéciale, mais d’une façon générale voici ce qu’il faut faire :

  • Exposez très clairement les faits, en phrases courtes de type sujet, verbe, complément.
  • Prouvez-les, au fur et à mesure que vous les exposez, par exemple: « Tel jour j’ai acheté telle fourniture (voir facture de l’entreprise JEVENDSTOUT du 2 janvier 2018 en pièce n°1) »;
  • Une fois les faits clairement exposés, expliquez ensuite votre point de vue, donc ce qui motive votre demande ou votre défense. C’est la partie généralement intitulée « Discussion ».
  • Enfin, une fois que vous avez clairement exposé la situation, explicitez clairement et synthétiquement vos demandes. Dans les conclusions rédigées par un avocat, ou dans un jugement, c’est la partie de l’argumentation figurant sous le titre « Par ces motifs ». Cela signifie, en gros, que « par les motifs précédemment exposés, je demande telle et telle chose ».
  • Donc dans cette dernière partie, dites clairement ce que vous voulez, par exemple:
    • Condamner telle personne à me payer telle somme ;
    • Expulser Untel du logement loué
    • Condamner Untel à faire telle chose sous astreinte de 10 euros par jour de retard…
    • Si vous êtes en défense : Débouter Untel de toutes ses demandes…
  • Enfin, à la toute fin de votre argumentation, ajoutez la liste numérotée des documents sur lesquels vous vous appuyez.

Je vous invite à consulter en fin d’article le modèle succinct que j’ai rédigé.

Il faudra, le jour de l’audience, fournir votre argumentation au juge de même que le dossier de pièces, numérotées et rangées dans l’ordre (sauf à ce que le juge demande, par écrit, à ce que cela soit communiqué avant).

Attention, point essentiel: il faudra avoir communiqué, préalablement à l’audience (quelques jours avant de préférence), votre argumentaire et vos documents à la partie adverse ou à son avocat, afin de respecter le principe du contradictoire.

Sinon vous allez fortement énerver le juge (et l’avocat adverse).

Lors de l’audience

Lors de l’audience, vous allez plaider votre dossier. C’est à dire l’expliquer au juge par oral.

Soyez concis, clair et calme. Parlez au juge, pas à la partie adverse.

Ne vous énervez jamais, ni contre la partie adverse, ni, surtout, contre le juge.

Et une fois l’audience finie, notez bien la date à laquelle la décision sera rendue, cela n’est jamais fait instantanément pendant l’audience.

Enfin, je joins ci-dessous un modèle très succinct pouvant vous guider pour rédiger votre argumentation.

 

Modèle (très, très) succinct de conclusions:

 

Conclusions devant le Tribunal [type de Tribunal] de [VILLE du Tribunal]

 Date de l’audience :

Pour : (vos coordonnées : nom, prénom, date et lieu de naissance, profession, domicile, si vous êtes une société, dénomination sociale, numéro d’immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés, adresse).

 Contre : (les coordonnées de votre ou vos adversaire-s)

 

Plaise au Tribunal

  1. Exposé des faits

Exposé synthétique et clair des faits.

Mentionner systématiquement les documents prouvant les faits exposés. Exemple : « Le 2 janvier 2018, j’ai acquis une tractopelle (voir facture en pièce n°1) ».

  1. Discussion

Expliquer clairement les raisons qui justifient votre argumentation, en relation avec les faits exposés au point précédent. Exemple : « La tractopelle n’a jamais fonctionné, je considère donc qu’elle est affectée d’un vice caché ».

Si vous avez exposé des frais pour vous défendre (« frais irrépétibles »), ne pas oublier d’en demander remboursement à la partie adverse. Donner les justificatifs.

Par ces motifs

Il est demandé au Tribunal de :

Par exemple :

  • Condamner Untel à payer telle somme
  • Rejeter la demande de Untel dirigée contre moi…
  • Condamner Untel à me régler une somme de 500 Euros à titre remboursement de mes frais irrépétibles ;
  • Condamner Untel aux entiers dépens.

 

Bordereau de pièces communiquées: 

  1. Document XX
  2. Document YY

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Pourvoi en Cassation, pourquoi, comment.

Lorsqu’on vient de recevoir un arrêt rendu par une Cour d’Appel, on peut envisager, s’il n’est pas très favorable, un pourvoi en cassation.

Il est donc préférable de comprendre comment fonctionne un pourvoi, et son utilité.

J’ai déjà exposé dans une série d’articles les mécanismes de l’appel et du pourvoi en cassation, et vous pouvez consulter ici celui consacré à la cassation.

D’abord, il faut savoir que généralement, la question du pourvoi se pose après un arrêt de Cour d’Appel.

Toutefois, certaines décisions ne sont pas susceptibles de faire l’objet d’un appel, et seulement d’une instance en cassation, lorsqu’elles concernent un intérêt inférieur à un certain montant. On les appelle les décisions « en dernier ressort ».

Par exemple, devant le Tribunal d’Instance, les décisions seront rendues en dernier ressort lorsque les litiges sont d’un montant inférieur à 4.000 euros.

Ceci étant précisé, revenons au pourvoi en cassation. Pour la suite, pour plus de facilité, on va supposer que l’on envisage la Cassation après un arrêt de Cour d’Appel.

Si l’on a une décision défavorable susceptible de pourvoi, il faut donc s’interroger pour savoir s’il est judicieux de faire un tel pourvoi.

Déjà, il faut savoir que le pourvoi en cassation n’est pas suspensif d’exécution. Donc, si on a été condamné, on ne peut former un pourvoi en cassation pour échapper aux condamnations prononcées par la Cour d’Appel.

Pire, si les condamnations ne sont pas exécutées, le pourvoi pourra faire l’objet d’une radiation.

Donc, si on veut juste gagner du temps pour ne pas exécuter ses condamnations, c’est loupé.

Ensuite, il faut savoir que la Cour de Cassation ne va pas juger l’affaire une troisième fois (après la première instance et la Cour d’Appel), mais va porter une appréciation strictement juridique.

Ainsi, elle ne va pas vérifier si telle ou telle chose est arrivée, mais elle va prendre les faits, tels qu’établis par la Cour d’Appel, et vérifier si la règle de droit a correctement été appliquée, et si les règles procédurales ont été respectées.

On peut prendre un exemple simple tiré du droit de la construction.

Comme je l’ai exposé dans deux articles précédents, la garantie décennale indemnise le Maître d’Ouvrage si le dommage qu’il subit porte atteinte à la solidité de son ouvrage ou le rend impropre à sa destination, selon la définition de l’article 1792 du Code Civil.

Typiquement, si les fondations d’une maison sont mal réalisées, et que des lézardes apparaissent, on va généralement considérer que la garantie décennale doit être mobilisée, puisque la solidité de la maison n’est plus garantie, et qu’elle est impropre à son usage (il pleut à l’intérieur).

En première instance et en appel, le Tribunal et la Cour d’Appel vont d’une part déterminer si oui ou non il y a des dommages, de quelle importance, puis les qualifier, afin de déterminer s’ils rentrent dans les conditions d’application de l’article 1792 du Code Civil, autrement dit, s’il y a atteinte à la solidité de l’ouvrage ou s’il devient impropre à sa destination. Si oui, les responsables du dommage seront condamnés.

Devant la Cour de Cassation, le raisonnement est tout autre.

La Cour de Cassation va ainsi prendre pour acquis ce que la Cour d’Appel a retenu sur la matérialité des dommages. Ainsi, si la Cour d’Appel a décidé que oui, il y a une grosse lézarde imputable à l’entreprise, la Cour de Cassation ne va aucunement le remettre en cause.

Ainsi, le juge du fond (le juge de la Cour d’Appel, donc) est seul à faire une appréciation, souveraine, des faits de la cause.

La Cour de Cassation, pour sa part, va se borner à vérifier que la règle de droit a bien été appliquée.

Elle va donc vérifier si l’existence d’une grosse lézarde est de nature à affecter l’ouvrage dans sa solidité, ou son usage.

Si elle considère que la Cour d’Appel a bien appliqué la règle de droit, la Cour de cassation va simplement rejeter le pourvoi en cassation.

Si en revanche la Cour de Cassation considère que la Cour d’Appel n’a pas bien appliqué le droit, elle « casse » l’arrêt, en tout ou en partie, et renvoie l’affaire, pour être rejugée, devant une autre Cour d’Appel.

Donc, face à un arrêt de Cour d’Appel défavorable, le bon réflexe n’est pas de contester les faits tels qu’ils ont été retenus par le juge, mais de regarder si on peut considérer que les juges d’appel n’ont pas fait une bonne appréciation du droit. Si oui, on peut tenter le pourvoi en cassation.

Enfin, en conclusion, il faut souligner que l’exposé que je viens de faire est, volontairement, succinct et synthétique. Il existe d’autres motifs justifiant la cassation de l’arrêt, dont l’application est relativement subtile. Donc si véritablement vous voulez contester un arrêt, la solution la plus judicieuse est de solliciter votre avocat afin d’obtenir une consultation sur les chances de succès d’un pourvoi en cassation.

À noter, ce ne sera pas votre avocat habituel qui s’en occupera, mais un avocat spécialisé, qui n’intervient que devant la Cour de Cassation et le Conseil d’Etat, et qui est rompu à la procédure et aux subtilités de la Cour de Cassation.

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Mon immeuble arrive en bout de décennale, que faire ?

Le présent article a pour but de donner, succinctement, quelques conseils sur la marche à suivre si vous êtes dans un immeuble qui arrive en bout de décennale et qui présente quelques défauts. Ou à tout le moins, que vous ne voulez pas laisser passer l’échéance sans rien faire.

D’abord, il faut  faire un inventaire exhaustif des problèmes subis par l’immeuble, tant dans les parties privatives que dans les parties communes. Cela peut aller de fenêtres qui ferment mal à des fissures ou des infiltrations dans le garage, par exemple.

La solution la plus judicieuse, si vous pouvez vous l’offrir, est de faire réaliser un audit de l’immeuble par un Architecte ou un Expert ingénieur en bâtiment. Pour info, voici un lien vers l’annuaire de l’Ordre des Architectes.

Une fois cet expert désigné, il viendra examiner l’immeuble de fond en comble pour relever les désordres que vous avez déjà vus, mais aussi pour vérifier s’il n’y en a pas d’autres.

Une fois son rapport déposé, vous pouvez envisager de saisir l’assurance décennale du constructeur de l’immeuble, ou la Dommages Ouvrage pour tenter de trouver une solution amiable.

Attention toutefois aux délais ! Il faut savoir qu’en cas de problème, si vous ne saisissez pas la justice avant l’expiration du délai de 10 ans, après vous ne pourrez rien faire, si aucune solution amiable n’a pu être trouvée.

Autrement dit, si une fois que vous avez l’inventaire précis des désordres affectant votre immeuble, votre constructeur et/ou son assureur n’agissent pas très rapidement pour les réparer, ou à tout le moins ne reconnaissent pas par écrit leur responsabilité, il faut saisir la justice au plus vite.

Par exemple, si votre immeuble a été réceptionné le 15 avril 2007, je conseille très fortement de saisir la justice le 14 avril 2017 au plus tard.

Maintenant, que peut-on espérer d’une telle démarche ?

Il faut savoir que votre immeuble bénéficie pendant dix ans non seulement de la garantie décennale, mais d’une garantie contractuelle également. (On oublie la biennale qui n’est plus d’aucun intérêt si vous êtes en fin de décennale…)

Donc, vous bénéficiez en premier lieu de la garantie décennale, dans un délai de dix ans à compter de la réception des travaux (qu’il ne faut pas confondre avec la livraison).

Cette garantie décennale couvre les dommages importants, qui soit mettent en péril la solidité de l’ouvrage (fissures…) soient le rendent impropre à sa destination (infiltrations en toiture qui n’assure plus le clos et le couvert).

Pour en savoir davantage sur le sujet, vous pouvez consulter les articles suivants,  ici et ici , consacrés à la garantie décennale.

Mais il faut aussi savoir que si les dommages affectant votre copropriété n’atteignent pas le niveau de gravité décennale (ce qui est plutôt une bonne nouvelle pour la pérennité de votre immeuble) vous pouvez néanmoins vous faire indemniser.

En effet, parallèlement à la garantie décennale existe une garantie contractuelle, qui permet d’indemniser les dommages moins importants. Il s’agit de la garantie des dommages intermédiaires. Attention, elle court dans les mêmes délais que la décennale, soit dix ans à compter de la réception. Là aussi, il faut faire attention aux dates.

Ainsi, en cas de désordres, vous disposez de plusieurs moyens d’obtenir une indemnisation de vos désordres. Le tout est de ne pas laisser passer l’anniversaire des dix ans de la réception.

 

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Comment forcer des travaux sur parties communes en copropriété

travaux sur parties communesComme je l’expliquais dans de précédents articles, pour faire des travaux sur parties communes, il faut une autorisation de l’Assemblée Générale, et il ne faut pas être pressé.

Ce qu’il faut toutefois savoir, c’est que si l’Assemblée Générale vous refuse vos travaux pour des motifs non sérieux, vous avez une possibilité de contourner ce refus, en saisissant le juge.

Reprenons du début. Si vous voulez faire des travaux qui affectent les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble, vous devez obtenir une autorisation de l’Assemblée Générale à la majorité absolue de l’article 25 de la loi de 1965.

Si vous voulez avoir toutes les chances d’obtenir votre autorisation, il est conseillé, en même temps que vous demandez votre inscription de résolution à l’Ordre du Jour, de communiquer au syndic, pour insertion dans les documents annexes à l’Ordre du Jour, tous les documents utiles: descriptif détaillé, devis de l’entreprise, attestation d’assurance de l’entreprise, éventuellement assurance Dommages Ouvrage…

Nous allons partir du principe que votre projet est viable, bien ficelé et ne peut causer de nuisances aux autres copropriétaires. Comme par exemple l’ouverture dans un mur porteur d’une porte, pour rassembler deux logements en un seul.

Et pourtant l’Assemblée Générale refuse, pour des motifs qui semblent davantage relever de la mesquinerie ou de la jalousie que d’un raisonnement étayé.

Dans ce cas, vous bénéficiez de la possibilité de contourner ce refus en saisissant le juge sur la base de l’article 30 de la loi du 10 juillet 1965 selon lequel:

« Lorsque l’assemblée générale refuse l’autorisation prévue à l’article 25 b, tout copropriétaire ou groupe de copropriétaires peut être autorisé par le tribunal de grande instance à exécuter, aux conditions fixées par le tribunal, tous travaux d’amélioration visés à l’alinéa 1er ci-dessus ; le tribunal fixe en outre les conditions dans lesquelles les autres copropriétaires pourront utiliser les installations ainsi réalisées. Lorsqu’il est possible d’en réserver l’usage à ceux des copropriétaires qui les ont exécutées, les autres copropriétaires ne pourront être autorisés à les utiliser qu’en versant leur quote-part du coût de ces installations, évalué à la date où cette faculté est exercée ».

Pour que cet article puisse s’appliquer, il faut:

  • Que les travaux objet de l’autorisation n’aient surtout pas été déjà réalisés,
  • Que ceux-ci constituent une amélioration (même seulement pour le copropriétaire concerné, ça n’a pas à être une amélioration pour tous),
  • Que le dossier présenté à l’Assemblée Générale soit complet afin que le juge puisse peser les tenants et les aboutissants du projet et n’hésite pas à l’approuver, en lieu et place de l’Assemblée Générale, s’il est correct (et qu’il est manifeste que c’est sans raison légitime que l’Assemblée Générale l’a refusé).

D’une façon générale, les travaux qui feront l’objet de l’autorisation n’auront vocation qu’à bénéficier au copropriétaire qui les demande.

Toutefois, s’il s’agit de travaux pouvant bénéficier à tous (installation d’un ascenseur…) les autres pourront être autorisés à en bénéficier pour peu qu’ils participent à leur installation.

Donc si l’Assemblée Générale refuse votre projet tout n’est pas perdu, et surtout ne faites pas les travaux sans autorisation. Par contre, le mécanisme que je viens de décrire va prendre, au minimum, des mois à fonctionner.

Où dois-je assigner : la compétence territoriale des tribunaux

Où dois-je assigner : la compétence territoriale des tribunauxLorsqu’on doit assigner un adversaire en justice, le premier réflexe est de déterminer le tribunal compétent.

Il faut d’abord déterminer quel type de tribunal est compétent : en matière civile, par exemple, on devra choisir, selon le type de litige, entre le tribunal d’instance, le tribunal de grande instance, le tribunal de commerce, à moins qu’il s’agisse d’un litige prud’homal, auquel cas c’est le Conseil de Prud’hommes qui est compétent… Sachant que selon le type de tribunal, les procédures seront gérées différemment.

Mais une fois choisi le bon type de tribunal, encore faut-il choisir le bon sur le plan géographique.

C’est la question de la compétence territoriale des tribunaux.

En matière civile, cette question de la compétence territoriale est très précisément définie.

La règle de base est que l’on saisit la juridiction du lieu où demeure le défendeur, ou l’un des défendeurs.

Par exemple, si vous habitez Toulouse et que votre adversaire habite à Bordeaux, vous devez saisir le tribunal de Bordeaux.

Si vous avez plusieurs défendeurs, un à Bordeaux, un à Lyon, un à Lille, vous pouvez choisir entre ces trois lieux. Mais vous ne pouvez pas assigner à Toulouse, le tribunal se déclarerait incompétent territorialement.

A l’exception du cas où votre adversaire n’a pas de domicile connu, auquel cas vous pouvez assigner à Toulouse.  En outre, si vous avez plusieurs adversaires dans diverses villes de France, et que l’un d’entre eux est à Toulouse, c’est bon, là aussi vous pouvez assigner « chez vous ».

Ensuite, arrivent les aménagements à la règle, ça se complique.

Ainsi, la compétence territoriale peut dépendre du type de litige, et le Code de Procédure Civile offre dans certains cas des options de compétence au demandeur.

Par exemple, si le litige porte sur un contrat, vous pouvez assigner devant le tribunal du lieu de la livraison effective de la chose ou de l’exécution de la prestation de service.

Par exemple, toujours si vous habitez à Toulouse, et qu’une entreprise Bordelaise vous livre du vin à domicile, vous pourrez assigner à Toulouse (lieu de la livraison) ou à Bordeaux (domicile du défendeur). Mais supposons que vous décidiez avec cette entreprise qu’elle livrera une adresse à Paris, là, vous avez le choix entre Bordeaux (domicile) et Paris (lieu de livraison).

Pareillement, si votre procès est relatif à une responsabilité délictuelle, vous pouvez choisir entre le lieu du domicile du responsable, le lieu où le fait dommageable a eu lieu, ou celui où le dommage a été subi.

Par exemple, une entreprise lyonnaise emboutit avec son camion de livraison le portail de votre résidence secondaire de Rennes (alors que vous habitez Toulouse). Vous pourrez ainsi assigner à Lyon (domicile) ou à Rennes (lieu où le fait dommageable s’est produit).

Enfin, il y a toute une série de compétences particulières, qui sont encore différentes des règles générales que je viens d’exposer. Par exemple, en matière de litige pour un bail d’habitation, seul le tribunal d’instance (compétence d’attribution) du lieu de l’immeuble loué (compétence territoriale) est compétent, comme je l’exposais dans un précédent billet.

Ainsi, comme on peut le voir, les règles de compétence requièrent un certain doigté pour ne pas se tromper.

 

Durée d’une procédure devant le TGI de Paris

Capture d’écran 2015-02-16 à 17.52.47J’ai fait récemment un article concernant les audiences de procédure devant les tribunaux civils.

Je pense qu’il est intéressant de le compléter par un rapide billet concernant la durée d’une procédure devant le Tribunal de Grande Instance de Paris. En effet, la question de la durée que peut prendre un procès est vitale, et souvent mal comprise du justiciable.

Il faut savoir que la durée d’une procédure devant le TGI de Paris (je parle de ce que je connais…) dépend de deux critères, un procédural, un pratique.

Le critère procédural, c’est qu’il faut tout simplement respecter les règles de procédures édictées par le Code de Procédure Civile, celles précisément que j’ai rappelées dans mon précédent billet.

Et là, forcément, vu qu’il s’agit d’aller d’audience de procédure en audience de procédure, cela prend un certain temps.

Sachant en outre que l’idée est de permettre à l’avocat, souvent surchargé, de s’organiser d’une audience sur l’autre (traduction : avoir le temps de sortir le dossier et de lui consacrer au moins une demi journée pour établir des conclusions).

Dans ces conditions, on comprend que sauf grande urgence, les audiences de procédure ne soient jamais espacées de moins d’un mois.

Même s’il faut bien dire qu’un tel espace d’un mois est assez illusoire dans la juridiction parisienne, hélas.

Ainsi, le TGI de Paris est terriblement surchargé, avec un nombre d’audiences fixes, et le budget de la justice ne permet pas vraiment d’engager de nouveaux juges pour faire face à l’afflux de dossiers. Autrement dit, le nombre des litiges augmente en permanence, et le tribunal doit y faire face avec, au mieux, des moyens constants, voire avec des moyens qui régressent (Et tout ça, sans parler des conditions matérielles de travail très difficiles des greffiers et juges…)

Autant dire que, malheureusement, cela ne va pas dans le sens d’une diminution des délais.

Ainsi, il faut toujours plusieurs mois pour qu’une affaire dont le tribunal est informé fasse l’objet de la toute première audience de procédure. Dans deux dossiers que j’ai pu traiter récemment, j’ai constaté un délai de 3 à 5 mois entre le placement de l’assignation et cette première audience.

Ensuite, l’écart entre audiences de procédures est d’au mieux 2 mois, plus souvent 3.

Ainsi, dans une affaire concernant une assemblée générale de copropriété que je conteste et qui a eu lieu fin 2014, le tribunal ayant reçu l’assignation en septembre 2014, la première audience a eu lieu début février 2015, et la prochaine sera début mai. Je ne pense pas que l’on plaide l’affaire avant la fin 2015.

Autant dire qu’il vaut mieux ne pas être pressé et tenir compte, dans sa stratégie, de ces délais.

Les audiences de procédure des tribunaux civils

Audiences de procédureRégulièrement j’ai pu m’apercevoir que le déroulement d’une procédure devant un tribunal civil (par opposition à pénal ou administratif) est souvent incompris. Ceci dit, ce n’est pas surprenant, vu que déjà, devant les juridictions civiles, les choses se déroulent très différemment selon que l’on est devant le Tribunal d’Instance, le Tribunal de Grande Instance ou le Tribunal de Commerce.

J’ai déjà fait un article sur la comparaison des procédures, mais je souhaite aborder la question sous un angle un peu différent ici, à savoir celui des audiences de procédure. En effet, les justiciables ne savent pas, généralement, s’il faut se déplacer à telle ou telle audience, par exemple.

Commençons par le plus simple, le Tribunal d’Instance (TI). Si vous assignez devant ce tribunal, ou y êtes assigné, on vous donnera une date d’audience. Là, c’est facile, c’est la date à laquelle l’affaire sera jugée, sauf à ce qu’il y ait un ou plusieurs renvois. Il faut donc être là (sauf si vous avez pris un avocat).

Donc, tout simplement, toutes les audiences devant le TI sont des audiences de plaidoirie (au moins potentielles) et il n’y a pas d’audiences de procédure.

Devant le TGI (Tribunal de Grande Instance), ça se corse. En effet, le suivi de la procédure, laquelle est entièrement écrite, contrairement au TI, fait l’objet d’audiences de procédure particulières, appelées audience de mise en état, suivies par le juge de la mise en état. Il s’appelle comme cela car c’est le juge qui s’assure que la procédure est, au fur et à mesure, mise en état d’être jugée.

Il faut savoir que c’est le tribunal, une fois l’assignation délivrée et placée, qui donne la première date d’audience, qui n’est donc pas marquée sur l’assignation.

Là, déjà, il est inutile de se déplacer par principe, puisque devant le TGI, vous êtes obligé d’avoir un avocat. Mais ce qu’il faut savoir, c’est qu’à part la toute dernière audience, où l’affaire se plaide, toutes les autres audiences sont des audiences de procédure, d’étape, où le juge s’assure simplement que les choses se passent bien : les avocats des parties communiquent en temps et en heures leurs conclusions, il peut y avoir des mesures administratives comme la jonction de deux instances… Bref c’est un processus exclusivement technique où en principe les questions de fond du dossier ne sont jamais abordées.

Donc, il est parfaitement inutile de songer à s’y déplacer (et de prendre un jour de congé pour cela comme je l’ai déjà vu). D’ailleurs, à présent, du moins à Paris et en région parisienne, les audiences font l’objet d’une communication dématérialisée par Internet. Traduction : tous les messages  à la juridiction doivent être communiqués au moins 48 heures avant l’audience, et sauf difficultés particulières, les avocats ne se déplacent pas. On peut donc avoir une audience avec un rôle comportant 25 affaires, et un juge seul dans la salle avec son greffier, qui énumère les affaires les unes après les autres. Les avocats ne s’y déplacent que s’il y a un point particulier qui demande une discussion qui ne peut avoir lieu par courrier.

En revanche, en fin de mise en état, une date d’audience de plaidoirie sera fixée : là, cela peut être intéressant de venir assister à l’audience pour voir comment cela se passe. Il faut toutefois savoir que la partie ne sera jamais entendue par le juge, seul son avocat a la parole.

Enfin, c’est encore différent devant le TC (Tribunal de Commerce). Comme devant le TI, une date sera marquée sur l’assignation. Toutefois, cette date n’est pas la date de plaidoirie, mais la date de la première audience de procédure. Ces audiences sont tenues « physiquement » (pas de dématérialisation ici, du moins pour l’instant) et un peu comme devant le TGI, il s’agit pour le tribunal de vérifier que les échanges d’écritures ont bien eu lieu, que les pièces ont été communiquées… En revanche, contrairement au TGI, les mesures d’administration judiciaire (comme une jonction de deux procédures, par exemple) ne se font pas simplement lors d’une audience d’étape : là, un juge va être désigné pour entendre les parties sur la mesure.

Puis on repart dans les audiences de procédure, et une fois que tout est en ordre, on est à nouveau renvoyé devant un juge pour l’audience de plaidoirie.

Concernant les audiences de procédure au TC, la représentation par avocat n’est pas obligatoire. Cependant, ces audiences sont très particulières (il peut y avoir 200 affaires qui passent en deux heures…) et il est souhaitable de prendre un correspondant sur place. Ne serait-ce que parce qu’il y a de fortes chances que le justiciable (voir même l’avocat qui n’est pas habitué) loupe son affaire, faute d’une attention très soutenue de toutes les secondes: les affaires se succèdent très vite, il y en a beaucoup, on ne sait jamais dans quelles catégorie va être placée son affaire donc on ne sait pas à quel moment faire particulièrement attention… Et même si on fait très attention, on peut encore louper l’affaire.

Je précise qu’en la matière, même pour les avocats, l’usage est, plutôt que de passer des heures (facturables) à gérer cela, on confie à un « mandataire » (généralement avocat) spécialisé de cette procédure, qui en suit des dizaines à la fois pour chaque audience, le soin de s’assurer du suivi, et ce pour un tarif forfaitaire qui au final est bien plus intéressant pour le client.

Procédure écrite et procédure orale

2B1623FD-58C9-48BE-996D-CF9DC04C69C6.image_600Devant les tribunaux, la procédures est soit écrite, soit orale ; j’en avais déjà touché quelques mots dans ce billet

Cela dépend des juridictions. La procédure sera orale devant le tribunal d’instance, le juge des référés, le juge de l’exécution, le tribunal de commerce, le conseil des prud’hommes, le juge pénal… En revanche, elle est écrite par exemple devant le Tribunal de Grande Instance, la Cour d’appel, le tribunal administratif…

La différence essentielle entre les deux types de procédures consiste en la façon dont le juge acceptera de prendre en compte les arguments présentés par les parties. 

En procédure écrite, tout doit être porté par écrit. Un argument de droit ou un élément de fait non visé dans les écritures ne sera purement et simplement pas pris en compte par le juge. C’est d’ailleurs ce qui justifie, devant les juridictions civiles, le formalisme des audiences de procédure : il s’agit pour le juge de s’assurer que chaque partie a pu prendre connaissance des arguments et pièces de l’autre, et qu’elle a eu la possibilité d’y répondre par écrit. 

En revanche, en matière de procédure orale, c’est plus souple. Le juge accepte les arguments présentés verbalement, pour peu que le principe du contradictoire soit respecté, c’est-à-dire que chacun ait pu avoir connaissance des arguments des autres et puisse les discuter. Si une partie formule à la barre un nouvel argument ébouriffant, et que l’autre partie a besoin de temps pour y répondre, par exemple en fournissant de documents, le juge soit renverra l’affaire à une prochaine date, soit autorisera, à titre exceptionnel, que des documents lui soient envoyés après la plaidoirie. 

La différence entre ces procédures a également un impact sur le temps passé à traiter le dossier. A dossier égal, chaque micro argument adverse, si l’on veut y répondre, devra donner lieu à de nouvelles conclusions en procédure écrite. En procédure orale, une simple réponse à l’audience peut suffire, ce qui pourra éviter d’avoir à rédiger des conclusions complémentaires. Gare à l’oubli des arguments devant la barre, toutefois… Il peut donc être malgré tout plus prudent de rédiger ses arguments entièrement par écrit afin que le juge ait une trace précise de ce que vous voulez dire. 

Cela est d’autant plus vrai qu’en matière de procédure orale, généralement la représentation par avocat n’est pas obligatoire et que les parties peuvent se défendre elles-mêmes. 

Image par Ttarasiuk’s

Licence Creative Commons

Les règles spéciales dérogent aux règles générales

Les règles spéciales dérogent aux règles généralesJ’aurais pu mettre en titre l’adage latin, « Specialia generalibus derogant », mais là j’avais peur de vous perdre en route. 

« Les règles spéciales dérogent aux règles générales » : qu’est ce que diable cela veut dire, et pourquoi est-ce important ? 

C’est important parce que c’est un principe qui permet de s’en sortir dans la jungle de la législation, et de trouver le bon texte applicable à votre situation. 

Il faut rappeler qu’en droit français, l’idée est de fixer un grand principe général, et de l’adapter aux cas précis (contrairement au droit anglo saxon qui part, traditionnellement, des cas précis pour permettre l’accès à un droit). 

Par exemple, on va fixer comme règle générale que toute faute commise par Primus au détriment de Secundus ouvre droit à indemnisation : Primus devra indemniser Secundus. C’est le mécanisme de la responsabilité délictuelle, qui est aujourd’hui assaisonné à toutes les sauces. Cela est bien pratique, puisqu’il suffit de revenir à la règle de base pour savoir quoi faire. 

C’est donc la « règle générale » du titre. 

Mais parfois, dans certains cas précis, il semble utile au législateur de créer des lois spéciales, adaptées à un problème précis. 

Par exemple, c’est le cas pour les accidents de la route. Avant 1985, on appliquait la responsabilité délictuelle que j’évoquais précédemment. On s’est toutefois aperçu que ce texte n’était pas adapté à la situation particulière, et c’est ainsi qu’on a édicté la loi de 1985. 

C’est donc une « règle spéciale ». 

Autrement dit, même si le texte général sur la responsabilité délictuelle reste en usage, dès qu’il y a accident de la route, on applique la règle spéciale, à savoir la loi de 1985. 

Dès lors, le principe signifiie que lorsqu’une règle spéciale traite d’un sujet particulier, c’est elle qu’il faut appliquer, par préférence (dérogation) à la règle générale. 

Un autre bon exemple réside dans la compétence des tribunaux. 

Par exemple, le tribunal de commerce est compétent pour tous litiges entre commerçant (personnes physiques commerçants ou sociétés commerciales). Supposons l’existence d’un bail commercial entre deux sociétés : en cas de litige, en principe, le tribunal de commerce devrait être compétent. 

Eh bien non. Il existe une disposition dans le Code de commerce qui énonce que tous les litiges concernant un bail commercial seront de la compétence du Tribunal de Grande Instance. Là encore, une règle spéciale déroge à une règle générale. 

Il faut donc être particulièrement vigilant lorsqu’il s’agit de saisir un tribunal, les apparences peuvent être trompeuses.

L’Assignation à jour fixe

Dans un précédent billet, j’expliquais que devant le Tribunal de Grande Instance, la procédure, relativement longue, se composait notamment d’une phase de « mise en état » constituée de plusieurs audiences de procédure, au cours desquelles le Juge vérifiait que chacun formulait ses arguments. 

Toutefois, parfois, certains dossiers ne se prêtent pas à un tel traitement de longue durée. Certains dossiers ont un caractère d’urgence qui nécessitent qu’une décision soit rendue rapidement. 

Comme je l’expliquais dans des billets précédents, la procédure de référé peut permettre à une partie d’obtenir un paiement relativement rapide

Toutefois ces procédures supposent que certaines conditions soient remplies, et généralement, outre l’urgence, il faut que le dossier présente un caractère certain d’évidence pour pouvoir être jugé. 

Or certains dossiers même urgents sont complexes, et ne présentent donc pas le caractère d’évidence permettant de mettre en oeuvre une procédure de référé. 

Si l’enjeu de ces dossiers est limité (10.000 Euros au maximum) il est possible que l’affaire soit jugée relativement rapidement devant le Tribunal d’Instance (où les délais sont généralement moins longs). 

Mais si l’affaire est complexe et que l’intérêt financier dépasse 10.000 Euros, le Tribunal de Grande Instance est forcément compétent. (Je précise que je n’aborde pas ici les dossiers relevant de juridictions particulières comme le Tribunal Administratif ; quant au Tribunal de Commerce il sera évoqué en fin de billet). 

C’est la raison pour laquelle il existe une procédure particulière devant le Tribunal de Grande Instance, dite de « jour fixe ». Elle consiste à permettre à une partie dont le dossier présente un réel caractère d’urgence d’obtenir une date de plaidoirie fixe (un peu comme devant le Tribunal d’Instance) et de passer outre la mise en état. 

Pour obtenir l’autorisation d’assigner à une date précise, donc « à jour fixe », il faut en demander l’autorisation par voie de requête en exposant les raisons de l’urgence. Si le Juge estime que l’urgence est caractérisée, il donne l’autorisation. 

Ainsi, l’affaire sera jugée à la date précitée (dans un délai de 2 à trois mois, quand même…). 

Cela reste toutefois une façon de procéder assez « sportive ». En effet, un peu comme devant le Tribunal d’Instance, en raison de cette date fixe et de l’absence de mise en état, les arguments de chacun seront souvent échangés dans les quelques jours précédant l’audience, voire la veille. 

Enfin, quelques mots sur le Tribunal de Commerce. La problématique de la longueur de traitement des dossiers devant ce Tribunal est globalement la même que celle devant le Tribunal de Grande Instance, ce qui fera l’objet d’un billet ultérieur. 

Ainsi, il existe une procédure similaire devant le Tribunal de Commerce, dite « à bref délai » qui permet elle aussi de passer outre la phase procédurale est d’être jugé rapidement.

Assignation mode d’emploi

Le jour où vous recevrez une assignation, il conviendra de l’examiner soigneusement, car plusieurs éléments vont vous permettre de la décrypter et de comprendre de quoi il s’agit.

Tout d’abord, qu’est ce qu’une assignation?

C’est l’acte introductif d’instance qui, dans une très grande majorité de cas, va débuter un procès. Comme le fait de ne pas se manifester à son procès (je reviendrai là dessus dans un article ultérieur) peut être très lourd de conséquences, il est prudent de prendre soigneusement en considération les termes de l’assignation afin de pouvoir y répondre au mieux.

Voyons successivement les points importants.

Le tribunal 

D’abord, déterminez de quel type de tribunal il s’agit, et où il est situé. Le tribunal doit être marqué dans le titre, qui est généralement rédigé dans le style :

« Assignation devant le Tribunal de Grande Instance de Paris ».

Le lieu du Tribunal permet naturellement de savoir où vous devrez éventuellement vous déplacer. Le type de Tribunal permet notamment de savoir si vous aurez ou non besoin d’un avocat.

Attention, pas de méprise sur ce point. D’une façon générale, il est préférable d’avoir un avocat, ne serait-ce que pour être à armes égales avec votre adversaire, qui, s’il vous adressé une assignation, en a généralement un (il est très rare qu’un particulier rédige une assignation. C’est généralement l’avocat qui le fait).

Mais l’avocat n’est obligatoire que devant certains tribunaux, et notamment le Tribunal de Grande Instance. Aussi, si vous êtes assigné devant le Juge de proximité, le Tribunal d’instance, le Tribunal de Commerce, vous n’avez pas l’obligation de contacter un avocat et pouvez vous défendre seul.

Attention, si vous n’êtes pas commerçant, en principe, vous pouvez refuser d’être jugé par le Tribunal de Commerce, qui est réservé aux commerçants et sociétés commerciales.

Le type d’affaire

Quand je parle de type d’audience, je fais référence à la question de savoir, notamment, si c’est une audience au fond ou en référé.

Normalement, cela devrait figurer dans le titre.

J’ai rédigé plusieurs billets sur le référé, notamment ici et ici, permettant de déterminer la différence entre l’action au fond et l’action en référé.

Pour faire simple, l’action en référé permet d’obtenir des résultats bien spécifiques selon une procédure d’urgence. L’action au fond, pour sa part, est moins rapide, mais permet d’aborder tous les aspects d’une question : en quelque sorte, on va au fond du problème.

Si c’est une assignation au fond, rien de particulier ne sera indiqué. Parfois, le titre sera « Assignation à toutes fins ».

En revanche, si c’est une assignation en référé, un indice ne trompe pas: l’assignation est devant « Monsieur le Président du Tribunal ».

Il convient donc de vérifier si les demandes sont formulées devant le tribunal (= assignation au fond) ou devant son président (= assignation en référé).

Il peut également s’agir d’une action au fond mais à jour fixe. Cela est également marqué sur la première ou la deuxième page de l’assignation. Cela signifie que l’affaire sera jugée selon les règles normales, avec un examen approfondi de toute l’affaire, et non selon les règles du référé mais à une date fixée et notée dans l’assignation.

D’où l’importance de consulter la date.

La date 

Si l’assignation est « au fond », aucune date ne sera mentionnée. Il est simplement indiqué que la personne qui reçoit l’assignation doit dans un délai de quinze jours avoir constitué avocat.

Cela signifie qu’il faut consulter un avocat, qui signalera à l’avocat de la personne qui a émis l’assignation qu’il intervient pour vous défendre.

Pas de panique, le non respect du délai de quinze jours n’entraîne pas de sanction particulière. Mais il est conseillé de ne pas traîner. Il ne faudrait pas que l’affaire se plaide sans vous…

Si l’assignation est en référé, au contraire, une date et une heure sont marquées sur l’assignation. ATTENTION: c’est la date à laquelle l’affaire sera plaidée. C’est une date très importante, aussi, n’attendez pas le dernier moment pour vous manifester.

Enfin, s’il s’agit d’une assignation à jour fixe, il y aura également une date et une heure qui seront indiquées. Là aussi, il s’agit de la date de plaidoirie, et il faudra être prêt pour ce moment là.

Le dispositif 

Le dispositif est la partie de l’assignation qui indique précisément ce qu’on vous demande. Il figure à la fin de l’assignation, sous la mention « Par ces motifs ».

Il est essentiel de le consulter, puisque c’est la partie de l’assignation qui permet de comprendre à quelle sauce le demandeur entend vous manger.

Généralement, il se présentera sous forme de liste, avec des demandes de condamnations chiffrées.

La motivation 

C’est la (généralement) longue partie qui figure sous le titre « Plaise au Tribunal » ou « Plaise à Monsieur le Président » et avant le dispositif, signalé comme je l’indiquais par le titre « Par ces motifs ».

C’est la partie dans laquelle votre adversaire explique pourquoi il pense avoir raison. C’est à cette partie qu’il conviendra de répondre pour démontrer au tribunal qu’il n’y a pas lieu de vous condamner à quoi que ce soit, voire à condamner le demandeur à votre profit.

Dès lors, avec ces quelques éléments, vous devriez être en mesure de comprendre le sens général de l’assignation qui vous a été délivrée, et d’en apprécier le niveau de gravité et d’urgence. Et de consulter votre avocat qui pourra faire une analyse plus approfondie.

Le raisonnement juridique : Première instance, Appel et Cassation (IV)

photo 3Nous touchons à la fin. Après avoir abordé la question du raisonnement juridique tout d’abord iciensuite ici, et enfin là, voici le quatrième billet consacré au sujet. 

Il revient à la distinction opérée dans le premier billet entre les faits et le droit, autrement dit à l’opération de qualification juridique

En effet, le mécanisme de la qualification juridique est illustré par la hiérarchie entre juridictions

Je m’explique. 

Lorsque vous avez un problème que vous voulez voir tranché devant un juge, vous vous présentez devant le Tribunal de Grande Instance, le Tribunal d’Instance, le Tribunal de Commerce ou le Conseil des Prud’hommes (pour demeurer dans les juridictions fréquemment saisies de l’ordre judiciaire). 

Le juge saisi examine les faits qui sont établis, et y applique la règle de droit. 

Si vous n’êtes pas satisfait de la solution (parce que vous avez perdu, ou que vous n’avez pas assez gagné..) vous interjetez appel devant la Cour d’Appel. 

Là, le même débat a lieu, une seconde fois. C’est en effet le droit de tout justiciable de voir son affaire jugée deux fois. On appelle cela le double degré de juridiction

Devant la Cour d’Appel, il faut présenter les mêmes demandes que devant la juridiction de première instance ; sauf exceptions, les demandes nouvelles sont proscrites. En revanche, on peut, à leur soutien, présenter de nouveaux arguments, de nouvelles preuves, de nouveaux faits. 

La similarité entre le juge de première instance et le juge d’appel, c’est que les deux ont le droit de dire si oui ou non, les faits que l’on présente sont prouvés, existent. 

Dans mon exemple de troubles du voisinage, ils ont tous les deux le droit de dire que oui, il est établi que le garage voisin fait du bruit et sent mauvais. 

La situation devient tout autre devant la Cour de Cassation. 

Si on forme un pourvoi devant la Cour de Cassation, c’est logiquement parce que la décision rendue par la Cour d’Appel n’est pas satisfaisante. Mais la façon de juger des magistrats de la Cour de Cassation est toute autre de celle des juges du fond, première instance et appel. 

Eux ne vont pas se préoccuper de savoir s’il existe des bruits ou des odeurs. Ils vont examiner l’arrêt d’appel. Si celui-ci mentionne l’existence de ces bruits et odeurs, ils vont le prendre pour acquis. 

Autrement dit, le juge de la Cour de Cassation n’examine pas la réalité, la présence des faits, mais vérifie ce qu’en a dit le précédent juge. 

Son seul et unique travail est celui de qualification juridique. 

C’est bien la raison pour laquelle la Cour de Cassation est considérée comme une juridiction « suprême », qui construit le droit. 

En effet, son travail est de donner des conséquences juridiques aux faits établis, en accord avec les lois et règlements. Elle vérifie ainsi que compte tenu d’éléments factuels donnés, la bonne conséquence de droit a été déduite par le juge d’appel. 

Par exemple, en matière de trouble de voisinage, elle considèrera ainsi que tel type de trouble, dont l’importance factuelle a été caractérisée par la Cour d’Appel, est un trouble anormal de voisinage… ou non. 

De la sorte la règle est établie. On sait que la Cour de Cassation considère que tel niveau de nuisance sonore est anormal, et que tel autre niveau est normal. Dans un cas, une indemnisation est possible, dans l’autre, non. 

La Cour de Cassation permet ainsi, en quelque sorte, de « ranger » les faits dans des cases juridiques, de façon à permettre de savoir quelle est la conséquence, ou l’absence de conséquence, de tel ou tel fait. 

Aussi, avant de former un pourvoi en cassation à l’encontre de telle ou telle décision d’appel, il convient de procéder à une analyse fine de la décision, pour déterminer si, au-delà des faits, il existe un moyen de dire que la Cour d’Appel n’a pas opéré une qualification juridique adéquate, de sorte que la Cour de Cassation peut, elle, faire cette qualification adéquate. 

Et que se passe t’il une fois que la Cour de Cassation a statué ? Schématiquement, il y a deux possibilités. 

Soit elle considère que la Cour d’Appel a correctement appliqué le droit aux faits qui lui étaient présentés, et elle rejette le pourvoi. Fin de l’histoire. 

Soit au contraire elle considère que la Cour d’Appel n’a pas correctement appliqué le droit, et dit ainsi dans le corps de sa décision la bonne façon de faire. 

Dans un tel cas de figure, la Cour de Cassation ne juge pas l’affaire. 

Elle invite une autre Cour d’Appel à le faire, en suivant ses directives. On dit qu’elle renvoie l’affaire devant la Cour d’Appel, cette dernière étant ainsi appelée la Cour d’Appel de renvoi. 

Dans un tel cas, l’affaire est de nouveau jugée devant une autre Cour d’Appel que celle qui a justifié le pourvoi, et cette autre cour a tout intérêt à respecter l’interprétation de la règle de droit donnée par la Cour de Cassation (même si certaines s’entêtent à juger autrement. Cela peut soit agacer la Cour de Cassation, soit l’inciter à modifier sa jurisprudence…) 

Et voilà comment la règle juridique de la qualification est traduite, dans la réalité, par l’existence de divers niveaux de juridiction, le tout dernier contrôlant la bonne application du droit. 

 

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Compétence des avocats sur le territoire français

Compétence des avocats sur le territoire françaisCas pratique. Vous habitez, disons… en région Parisienne, par exemple à Châtillon. Vous connaissez déjà un avocat, du barreau de Paris, à qui vous faites appel en cas de besoin.

Vous êtes en train de me faire installer une cuisine. Par des artisans…, disons, toulousains. (Vous ne connaissiez pas la grande réputation des installateurs de cuisine de Haute Garonne ? Pourtant…)

Sauf que le travail n’est pas, mais pas du tout, correctement fait, et en plus l’installation a pris un retard considérable. Bref, vous vous retrouvez face à un litige et avez bien l’intention de saisir un avocat pour que justice soit faite. L’ennui, c’est que la société à l’origine de votre litige est située à Toulouse et que votre avocat habituel en qui vous avez confiance est à Paris ! Que faire ?

Eh bien, aller le voir !

Si, si.

Certes, les avocats sont organisés en barreaux selon leur situation géographique. Mais cela ne veut pas dire que votre avocat parisien ne peut pas gérer l’affaire.

Tout d’abord, vu mon exemple, il pourra très probablement trouver un moyen de faire juger l’affaire en région parisienne, en application des règles du code de procédure.

Mais si tant est qu’il ne puisse pas… ce n’est pas gravissime : votre avocat parisien pourra aller plaider à Toulouse.

Comment est-ce possible, vu qu’il n’est pas inscrit au barreau de Toulouse ?

C’est possible pour deux séries de raisons différentes.

La première tient à la différence entre le fait de suivre la procédure et celui de traiter le fond du dossier. Pour les tribunaux devant lesquels un avocat est obligatoire, il faut absolument être représenté par un avocat local en termes de procédure. Mais pour ce qui est de traiter le dossier, un avocat d’un autre barreau peut s’en occuper.

C’est le mécanisme de la postulation.

Dans mon exemple, l’avocat parisien fait tout le travail de recherche et de rédaction, et par ailleurs charge un avocat toulousain, son postulant, de s’occuper de toutes les questions de procédure en ses lieu et place et sous son nom d’avocat toulousain. Le jour de l’audience seulement, l’avocat parisien se déplacera pour plaider.

La compétence des avocats pour plaider le dossier est donc sur tout le territoire, mais devant les juridictions où la représentation par avocat est obligatoire, il faut impérativement avoir un correspondant sur place qui s’occupe de la procédure.

Cela revient-il plus cher ? Pas forcément. En effet, lorsque vous saisissez un avocat parisien pour un litige situé à Paris (ou bien un avocat toulousain pour un litige à Toulouse), votre avocat fait tout le travail seul : tant la gestion du dossier au fond, que la gestion de la procédure. Ainsi, vous lui réglez ces deux types de prestation.

Alors que lorsque vous avez un avocat plaidant (parisien dans mon exemple) et un avocat postulant (toulousain), l’avocat plaidant ne vous facture naturellement pas le suivi de la procédure, que vous réglez au postulant. En somme, tout s’équilibre.

Ainsi, le fait d’avoir à gérer une procédure géographiquement éloignée ne pose pas de difficulté.

Ah, vous vous demandez quelle est l’autre raison qui explique que votre avocat parisien puisse aller plaider à Toulouse.

C’est tout simplement parce que devant plusieurs tribunaux (Tribunal d’Instance, Conseil des Prud’hommes…) le ministère d’avocat n’est pas obligatoire. Donc, il n’est nul besoin de saisir un avocat sur place pour suivre la procédure, votre avocat parisien habituel pourra tout faire lui-même. Tout simplement.

Dernière chose concernant les avocats parisiens (et par conséquent moi-même) : nous pouvons, concernant les tribunaux pour lesquels l’avocat est obligatoire, agir sans assistance d’un postulant non seulement à Paris, mais également à Nanterre, Bobigny et Créteil.

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